Archive dans mars 2017

Une brève histoire de l’Europe

Crédit photo : Claude TRUONG-NGOC

En France, au Royaume-Uni, aux Pays Bas ou encore au Danemark, le vif succès des campagnes anti-Europe le montrent : 2017 est une année cruciale pour l’Union Européenne.
Nous célébrerons cette année les 25 ans du traité de Maastricht, les 60 ans du traité de Rome, mais également les 10 ans du début des négociations du traité de Lisbonne. Ces trois dates anniversaires, bien placées pour rendre compte de l’avancée des idéaux ayant motivé ces traités, ne semblent pourtant pas être la préoccupation majeure des dirigeants Européens. Du coté des ressortissants de l’Union, l’Europe ne constitue plus un sujet d’intérêt majeur non plus : les taux d’abstention aux élections européennes l’illustrent. L’institution est souvent perçue comme trop floue, antidémocratique, mais également comme la source des crises répétées que nous traversons.

Il existait quelques mouvements pour une union des états Européens avant la Seconde Guerre mondiale. Le réel espoir d’une union n’apparut cependant qu’après la guerre. D’abord poussé par différents groupes européistes partout en Europe, ce projet a pu se concrétiser dans un premier temps grâce à l’aide financière apportée par le plan Marshall. Celle-ci s’accompagnait de la création de l’OECE. Peu à peu, l’idée d’une Communauté européenne se structure et gagne en notoriété. Elle gagne également en contestation : c’est le début de l’opposition entre souverainistes et unionistes. Les souverainistes soutiennent une union économique dans laquelle chaque pays reste totalement souverain, quand les unionistes demandent que les pays de l’union soient régis par des organes supranationaux. Encore source de divisions aujourd’hui, cette question est souvent la cause des désaccords sur le rôle de l’Union Européenne. En 1950, six pays d’Europe (la France, l’Allemagne, l’Italie, la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg) voulant s’impliquer dans la création d’une Union signent le Traité de Paris. Ils établissent la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier. Présidée par Jean Monnet, celle-ci avait pour but de favoriser les échanges intra-régionaux en abolissant les frais de douanes sur ces produits entre les pays signataires.

Constatant que le projet Européen s’essoufflait avec le temps, Jean Monnet démissionna en 1954 de la présidence de la CECA. Il décide de créer en même temps le Comité des Etats-Unis d’Europe. Influente auprès des gouvernements, l’Europe des Six demande l’élaboration d’un projet pour franchir un pas dans la construction européenne. En 1957, ce projet se transforme en traités : les traités de Rome. Les 6 pays signataires du traité de Paris signent les traités de Rome, s’engageant ainsi à :

  •  Établir un marché commun ainsi que permettre un rapprochement économique des États membres.
  • Mener une action commune pour le progrès économique et social de leur pays en harmonisant les relations européennes.
  • Tout faire pour l’amélioration des conditions de vie des citoyens.
  • Sauvegarder la paix.

De plus, les signataires appellent les autres peuples partageant les idéaux prônés par le traité de Rome à les rejoindre.

Ces différents engagements ainsi que cet appel traduisaient déjà, dans une certaine mesure, les valeurs de l’Europe telles que nous les connaissons aujourd’hui : l’unité économique, l’esprit de communauté et la volonté de paix. De là naissait la Communauté Economique Européenne.

Le succès de celle-ci permit un premier élargissement en 1973 : le Royaume-Uni, l’Irlande et le Danemark entrèrent dans la communauté. Celle-ci fut rapidement mise à l’épreuve : divergences entre les États membres, apparition du chômage de masse, début de la désindustrialisation… Ces nombreux facteurs ont contribué à l’affaiblissement de la communauté économique, et la stagnation de la construction européenne.

À partir de 1984, Jacques Delors arrive pour relancer cette dernière. La commission Delors avait pour but de relancer la dynamique communautaire. Pour ce faire, diverses mesures furent mises en place : le deuxième élargissement (Grèce et Espagne en 1981 et Portugal en 1986) ; la mise en place d’un marché unique, ainsi que la préparation au passage a la monnaie unique. Ces différentes mesures préparaient le grand traité de réforme de la communauté européenne : le traité de Maastricht.

Le 7 février 1992 est signé le traité de Maastricht. Projet ambitieux, il est soumis à référendum en France et passe de justesse (51,02% pour). De ce traité est née l’Union Européenne. EN complément à la CEE, l’Union possède une dimension politique. De plus elle donne de nouveaux droits à ses habitants :

  • Renforcement d’une union économique et monétaire : monnaie unique en 1999.
  • Politique de sécurité commune.
  • Coopération dans la justice.
  • Politique d’Asile commune.
  • Circulation libre au sein de l’Union Européenne
  • Droit de vote aux élections municipales et européennes, ainsi que droit de pétition devant le Parlement européen.

Cependant, le traité de Maastricht, nous l’avons dit, a été accepté par une très faible majorité des Français. L’importance de celui-ci a réveillé les souverainistes, mais a également soulevé des interrogations auprès des populations. L’Union Européenne semblait s’éloigner des idéaux sur lesquels elle se fondait. La prospérité se faisait attendre alors que le chômage de masse s’intensifiait, et la crise yougoslave donnait l’image d’une Europe affaiblie.

Mais Maastricht offrit un élan à l’Union européenne pour sortir de cette crise. En 1995, le troisième élargissement permit l’entrée de l’Autriche, la Suède et la Finlande dans l’Union. La monnaie unique, l’Euro, fut instaurée en 1999. En 2002, les monnaies nationales disparaissent : c’est le début d’une nouvelle ère.

L’Union ne cesse de grandir et compte vingt-cinq membres en 2004. Pour répondre à un quatrième élargissement, une commission présidée par Valéry Giscard d’Estaing est mise en place pour rédiger une constitution européenne. Celle-ci a pour buts principaux de redonner du pouvoir à l’Institution sur les membres de l’Union, et de renforcer l’idée d’une défense commune. Elle vise aussi à renforcer le pouvoir du Parlement européen ainsi que de la Commission européenne. Cela n’a pas empêché la France de voter non à 54% au référendum du 29 mai 2005. Il est difficile de ne pas y voir une certaine ironie lorsque l’aspect démocratique de l’Union est remis en question. Les raisons de ce « non » doivent néanmoins être expliquées pour que nous puissions le comprendre : la faible croissance des États européens entamait énormément la crédibilité de l’institution. De plus, la complexité des textes et la difficile explication de ceux-ci aux Français ont conduit au blocage du traité constitutionnel. La France n’était pas seule dans cette position : une semaine après, les Pays-Bas suivaient le même chemin.

Mais l’Europe que nous connaissons aujourd’hui est née du traité de Lisbonne, entré en vigueur en décembre 2009. Élaboré pour sortir l’Union d’un blocage total suite à l’échec de la constitution de 2005, ce traité visait à faire évoluer les institutions européennes après l’entrée de deux nouveaux membres dans l’union : la Bulgarie et la Roumanie. Ce traité permit de donner à l’Union une  plus grande ampleur sur la scène internationale : celle-ci devint une personnalité juridique, apte à signer des traités internationaux au nom de ses membres. C’est également le début d’une nouvelle diplomatie européenne, et l’adoption de la charte des droits fondamentaux. De plus, c’est à partir de ce traité que la banque centrale prit une réelle importance, devenant le premier organe supranational européen. Enfin, le traité de Lisbonne a instauré le célèbre article 50, l’article permettant à un état membre d’entamer une procédure de divorce avec l’Union.

Maastricht n’a pas empêché la naissance de crises graves au sein de l’Union, pouvant remettre en question sa légitimité. D’abord, la faillite de la Grèce en 2009, créant des discordances au sein même des États membres. La guerre en Syrie et les conditions économiques dans certains pays d’Afrique provoquent des migrations que l’Union ne parvient pas à gérer, encore à cause de discordances internes. Sur cette guerre en Syrie, les membres n’ont pas su tenir une position commune, réduisant alors la crédibilité de chacun. En juin 2016, le vote en faveur Brexit de la population britannique a également contribué à la déstabilisation de l’Europe. Le résultat politique de ces crises répétées semble générer à un nouveau clivage : protectionnisme contre libre-échange. Les nombreuses élections à venir en Europe nous diront quelle vision l’emportera et quel sort l’Union embrassera.

Le fact-checking du Grand Débat : 18 déclarations décryptées

Source photo : AFP / Eliot Blondet

Lundi soir, les cinq principaux candidats à l’élection présidentielle se sont rencontrés sur le plateau de TF1 pour s’affronter sur de nombreuses thématiques: immigration, fiscalité, chômage, énergie…
Décryptage de 18 déclarations des candidats.

Avertissement : de nombreux facts-checking ayant déjà été faits, nous ne traitons pas l’ensemble des intoxs.
Nous vous invitons à consulter cet article des Décodeurs du Monde pour compléter notre travail : https://goo.gl/HcfPXS

Certains candidats étant particulièrement attentifs aux chiffres qu’ils donnent, nous n’avons parfois relevé que très peu d’erreurs.



Benoît Hamon :

« La réalité c’est quoi ? S’il y a 200 000 entrées légales d’immigrés en France par an, il y en a plus de 150 000 qui repartent. Nous avons aujourd’hui un solde migratoire qui doit être entre 50 000 et 70 000 personnes »

VRAI

Mais ceux qui partent ne sont pas tous des étrangers: d’après l’Obs, 60 000 à 80 000 Français quittent le territoire chaque année.
Il faut aussi compter les étudiants
Erasmus qui, à la fin de leur séjour, retournent dans leurs pays d’origine.
Si l’on ne se concentre qu’uniquement sur les immigrés -comme le sous-entend Benoît Hamon-, le nombre d’arrivées dépasse de 140 000 celui des départs, et non pas « entre 50 000 et 70 000 ».

En savoir plus : http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20150414.OBS7159/expatries-qu-est-ce-qui-les-pousse-a-partir.html
http://www.touteleurope.eu/actualite/ou-vont-les-etudiants-erasmus-en-europe.html


« La France était le pays en Europe avec les journées d’école les plus chargées, avant la réforme scolaire »

PLUTÔT VRAI

D’après les chiffres de l’éducation nationale, en 2012 -soit 2 années après la réforme scolaire-, la France se distinguait effectivement par des journées d’écoles chargées; avec une moyenne nationale de plus de 7 432 heures de cours par année. Loin devant la Grèce qui, par exemple, ne comptabilisait qu’en moyenne 6362 heures.
Néanmoins, Benoît Hamon gonfle l’idée : la France n’occupait que la 7ème place du classement.

En savoir plus : http://www.linternaute.com/actualite/monde/les-pays-champions-de-l-education/volumes-horaires.shtml
http://www.education.gouv.fr/archives/2012/refondonslecole/wp-content/uploads/2012/09/consulter_la_comparaison_internationale_sur_les_rythmes_scolaires1.pdf



 Emmanuel Macron :

« En CM2, 20% des élève ne savent pas proprement lire, écrire ou compter. Cette proportion peut atteindre les 50 voire 60% dans les ZEP »

UNE PARTIE VRAIE …

La moyenne nationale d’élèves illettrés à la fin du CM2 est bien de 20%.

… UNE PARTIE FAUSSE

La proportion d’élèves illettrés dans les ZEP est d’environ 30%, soit deux fois moins importante que la proportion donnée par le candidat.

En savoir plus : http://circvaldereuil.spip.acrouen.fr/IMG/pdf/FPORSOC11l_D1_Eleves.pdf


« L’administration française accorde 200 000 titres de séjours chaque année »

VRAI

Les données du ministère de l’intérieur  permettent effectivement de confirmer ce chiffre :

En savoir plus : http://www.immigration.interieur.gouv.fr/Info-ressources/Donnees-statistiques/Donnees-de-l-immigration-de-l-asile-et-de-l-acces-a-la-nationalite-francaise/Archives/Statistiques-publiees-en-juillet-2016/L-admission-au-sejour-Les-titres-de-sejour-statistiques


“La France n’accueille pas assez de demandeurs d’asiles, seulement quelques milliers”

VRAI ET FAUX

La France a accueilli légèrement plus de 26 000 réfugiés en 2016. Cela semble relativement peu, mais il est important de ne pas oublier que la France est le 4ème pays d’Europe à accueillir le plus de migrants. Seulement, ce score est loin d’être brillant comparé à l’Allemagne, où ce ne sont pas moins de 140 000 demandes d’asiles qui ont étés acceptées en 2015.

En savoir plus : http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2016/04/21/asile-plus-360-000-refugies-accueillis-en-2015-en-europe_4906413_4355770.html


En Marche! est financé par 32 000 personnes donatrices, avec un don moyen de 50 euros environ”:

VRAI OU FAUX : CELA DÉPEND EN PARTIE DE SON HONNÊTETÉ

En décembre 2016, ce chiffre était d’environ 11 000 donateurs, pour une moyenne de 300 euros par don.
S’il est tout à fait possible que le mouvement ait enregistré quelques 20 000 dons supplémentaires entre décembre 2016 et mars 2017, il est cependant étonnant que la valeur moyenne des dons puisse chuter de de 300€ à 50€…

En savoir plus: http://www.20minutes.fr/politique/1979263-20161213-presidentielle-dons-emprunts-comment-emmanuel-macron-finance-ambitieuse-campagne



Jean-Luc Mélenchon :

« La France se fait voler 85 milliards par les tricheurs du Fisc »

VRAI ET FAUX

Malgré une réelle difficulté à estimer la fraude fiscale, il est certain qu’aucune étude sérieuse n’ait mentionnée pareille somme.
La commission d’enquête sénatoriale sur l’évasion des capitaux la fraude fiscale estime un maximum de 60 milliards d’euros.
Le syndicat national Solidaires-Finances publiques évoque, quant à lui, un montant d’environ 60 milliards d’euros.

En savoir plus: https://www.senat.fr/notice-rapport/2011/r11-673-1-notice.html et http://archives.solidairesfinancespubliques.fr/gen/cp/dp/dp2013/120122_Rapport_fraude_evasionfiscale.pdf


« Dans le prochain mandat, 18 réacteurs nucléaires fêteront leurs 40 ans, il faut 100 milliards pour les caréner »
(point culture : http://www.cnrtl.fr/definition/caréner – définition de “Caréner”)

FAUX

18 réacteurs nucléaires sur les 59 que compte la France arriveront effectivement à la date fatidique des 40 ans d’existence lors du prochain quinquennat. Ils nécessiterons donc un carénage.
Néanmoins, les 100 milliards évoqués correspondent en réalité au coût d’un plan sur 40 ans surnommé « le grand carénage » visant à rénover l’ensemble des réacteurs nucléaires français, et non pas 18 d’entre-eux.

En savoir plus : http://energie.lexpansion.com/energie-nucleaire/nucleaire-qu-est-ce-que-le-grand-carenage-_a-32-8015.html


« La France est l’un des pays qui produit le plus d’ingénieurs pour 100 000 habitants »

VRAI… IL Y A PLUS DE 15 ANS

Selon Eurostat, en 2001, la France se classait parmi les premiers producteurs d’ingénieurs de l’Union Européenne.

FAUX AUJOURD’HUI

Toujours selon Eurostat, en 2014, l’hexagone comptait seulement 1 ingénieur pour 1000 habitants.Un taux relativement faible.
Il n’existe cependant aucune base de donnée à l’échelle mondiale, Eurostat ne concentrant ses études qu’uniquement sur les pays européens.

En savoir plus : http://ec.europa.eu/eurostat/web/products-datasets/-/educ_uoe_grad07 et https://goo.gl/eFtHMh


« Le temps de travail, depuis le début du XXème siècle, a diminué de moitié. Mais on produit 30% de plus de richesse” – JL. Mélenchon

VRAI POUR LE TEMPS DE TRAVAIL

Une étude l’INSEE rend compte de cette dynamique : le temps de travail annuel a globalement baissé dans les pays développés, passant d’environ 2200 heures / années en 1950 à environ 1600 heures / années en 2008.

FAUX POUR LA HAUSSE DE LA PRODUCTION DE RICHESSES

Dans son livre « Le Capital au XXIème siècle », l’économiste Thomas Piketty constate une croissance du PIB mondial d’en moyenne 3%/an entre 1913 et 2012.

En savoir plus : https://www.insee.fr/fr/statistiques/1281175



François Fillon :

« Ça n’a jamais créé de l’emploi de réduire le temps de travail » – F. Fillon

FAUX

Un rapport, non-publié, de la très sérieuse Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) concluait l’an dernier que la réduction du temps de travail peut contribuer au recul du chômage.
Un rapport du Sénat sur les 35h, publié cette fois-ci, va dans la même direction : les 35 heures ont été responsables de 30% des créations d’emplois en 2000.

En savoir plus : http://www.liberation.fr/france/2016/07/18/selon-un-rapport-censure-de-l-igas-les-35-heures-ont-bien-cree-350-000-emplois_1466926 et https://www.senat.fr/rap/r00-414/r00-4146.html


« La France est aujourd’hui le pays où le volume d’heures travaillées est le plus bas » – F. Fillon

VRAI

Selon l’OCDE, en 2015 les Français travaillaient en moyenne 36 heures par semaine.
C’est par exemple moins qu’aux Etats-Unis avec 38,6 heures.


« Chaque année, 150 000 élèves sortent du système scolaire sans diplôme » – F. Fillon

C’ÉTAIT PRESQUE VRAI…Il y a 5 ans.

Selon les données du ministère de l’Éducation, le chiffre était de 122 000 élèves en 2010 et est descendu à 98 000 en 2016 chez les 18-24 ans.

En savoir plus : Enquête Deep + Chiffres Ministère de l’éducation



Marine Le Pen :

« Les résultats de la Grande Bretagne sont formidables. »

ON EN SAIT RIEN

Le processus conduisant au Brexit sera seulement entamé le 29 mars. Il n’y a donc aucun résultat, pour le moment, sur la situation du pays.


« En réalité, sous le mandat de Nicolas Sarkozy, il y a eu 12 500 policiers et gendarmes qui ont été supprimés. »

VRAI MAIS EXAGÉRÉ

Pour Marine Le Pen, il n’y a pas suffisamment de gendarmes et de policiers. Dailleurs, lorsque les notions de sécurité et de justice sont abordées, elle n’hésite pas à faire allusion à Nicolas Sarkozy lorsque ce dernier a supprimé “12 500 policiers” lors de son mandat selon la candidate. Pourtant, ces chiffres sont exagérés. En effet, en octobre 2016, l’ancien Président de la République a affirmé à Jean-Jacques Bourdin qu’il ne regrettait pas d’avoir supprimé les 12 469 postes de gendarmes et de policiers.


« Explosion de l’insécurité, de la violence, des cambriolages dans l’intégralité du territoire. »

VRAI ET FAUX

Alors que Gilles Bouleau demande à Marine Le Pen si “abaisser la majorité pénale de 18 à 16 ans” est une bonne ou mauvaise réforme, la candidate affirme toute de suite qu’il existe une “explosion de l’insécurité” ce qui est vrai. Selon le premier bilan statistique de l’insécurité et délinquance en 2016, les auteurs des vols sans violences “sont jeunes et quasi-exclusivement (93 %) de nationalité française” et le bilan montre que les vols avec violences sont en baisse. Cependant, les auteurs de ces vols sont majoritairement des jeunes “âgées de 15 à 25 ans”. Il n’y a donc pas d’”explosion de l’insécurité” ou “de la violence” comme l’a pu affirmer la candidate.

En savoir plus : http://www.interieur.gouv.fr/Interstats/Actualites/Insecurite-et-delinquance-en-2016-premier-bilan-statistique


« 200 000 étrangers légaux entrent en France chaque année. »

VRAI

Quant à l’immigration, elle souhaite supprimer le droit du sol et stopper l’immigration légale mais aussi illégale et selon elle “c’est clair” . La candidate n’hésite pas à comparer la situation en Italie et en Grèce car selon elle il y a une non-maîtrise du flux migratoire. Elle ajoute également un chiffre dans son argument : 200 000. Ce chiffre correspond aux étrangers venus s’installer en France en 2016 –  plus précisément, il y avait “227 550 titres de séjour” qui ont été délivrés selon Bernard Cazeneuve – mais aussi chaque année selon l’INSEE.

En savoir plus : https://www.insee.fr/fr/statistiques/1281393


« On importe des produits en France sans respecter aucune norme, sans aucun contrôle. »

FAUX

Toutes importations de produits alimentaires passe par l’obligation de l’importateur à remplir un « Document Commun d’Entrée » (DCE) qui renseigne précisément sur l’origine et l’identité du produit. Si l’importateur ne remplit pas le DCE et/ou si les analyses en laboratoire montrent la non-conformité du produit, celui-ci devra être sorti du territoire français.

En savoir plus : DCE



Article co-écrit par Antoine Glaud, Arthur Roudaut, Léo Sylvan, Nora Hmi, Rosalie Buu et Pierre-Baptiste Borges.

Destitution de la présidente sud-coréenne: et après ?

Pour bien comprendre les relations entre les différents acteurs avant de commencer la lecture de l’article, nous vous proposons cette infographie :


Le vendredi 10 mars, la Cour Constitutionnelle sud-coréenne destituait la présidente Park Geun hye, validant le vote du Parlement de décembre dernier. Voilà trois mois que les Coréens manifestaient tous les samedis sur la place de Guanghwamun à Séoul, dans l’attente de cette décision. Prise dans un scandale de corruption, elle et sa confidente Choi Soon-sil auraient perçu l’équivalent de 62 millions d’euros des chaebols (grands groupes industriels coréens), dans le but d’orienter la politique du pays dans le sens des entreprises…

Qu’est-ce que le Choigate? Comment l’affaire a-t-elle été révélée au grand jour ?

En octobre dernier, la chaîne de télévision sud-coréenne JTBC révélait l’amitié de longue date de Park Geun hye et Choi Soon-sil, une femme d’affaires méconnue qui s’avérait diriger le pays dans l’ombre. Un reporter a épié l’ordinateur de Mme Choi, dans lequel se trouvaient des  brouillons de discours de la présidente, une carte routière de la Corée du Nord, mais aussi des dossiers sur les remaniements ministériels. En Corée du Sud, la possession illégale de ces informations fait encourir jusqu’à sept ans de prison et une amende de 16 400 euros.

Par la suite ont été découverts les versements phénoménaux que percevaient les fondations fictives de Choi Soon-sil, présentées comme promouvant des activités « culturelles et sportives »,  tel que la  « K-sport foundation » ou la « M-Ru foundation ». Or, ces donations n’avaient pas de visée caritative. Elles ont en réalité servi l’intérêt personnel du couple le plus puissant et paradoxalement invisible du pays : Mme Choi et son ex-mari  Chung Yoon-hoi, membre du staff de la présidente alors qu’elle était législatrice de 1998 à 2004. Park Geun hye ne passait qu’au second plan dans la prise de décisions.

La nouvelle a été d’autant plus choquante, que celle surnommée « Raspoutine » n’est autre que la fille de Choi Tae-Min, leader autoproclamé de « l’Église de la vie éternelle » : une secte chamanique. Il aurait influencé la présidente durant des années, puisqu’il était déjà proche de son père, l’ancien dictateur Park Chung-hee (1962-1979).

Parmi les entreprises impliquées dans ce trafic d’influence, le leader mondial coréen de la vente de téléphone mobile Samsung, a fait la une des journaux. Son PDG, Lee Jay Yong, a été arrêté le 17 février, puis mis en examen pour corruption et détournement de fonds. En 2014, « L’héritier de l’empire Samsung » prenait la place de son père Lee Jun-hee -victime d’une crise cardiaque-  en tant que numéro un du géant commercial. Le groupe aurait versé jusqu’à l’équivalent de 37 millions d’euros  à la présidente. Lee Jay Yong a admis les transactions, mais a nié avoir cherché à exercer une quelconque influence politique.

Une corruption profondément ancrée dans la société coréenne

A l’époque où il dirigeait encore Samsung, Lee Jun-hee a lui-même été accusé de corruption et condamné à trois années de prison à deux reprises : la première fois en 2008 pour évasion fiscale et création d’un fonds secret de 182 millions d’euros, finançant la complaisance des membres du gouvernement et d’hommes politiques ; la deuxième pour abus de confiance en vue de faciliter un transfert de pouvoir illégal à son fils. Cependant, le puissant homme d’affaires n’a jamais purgé ses peines, et ce au nom de « l’intérêt économique national ». En effet, Samsung est indispensable à l’économie sud-coréenne. Moteur de la reconstruction du pays, qui était des plus démunis au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le groupe a participé à sa croissance phénoménale, le menant au rang de quatrième économie d’Asie.  18e au classement des entreprises publiques les plus riches en 2016 selon le magazine Forbes, il a cette année fait un chiffre d’affaires de 222 milliards d’euros et était à l’origine de 20% des exportations nationales. Le pouvoir de ses dirigeants s’est facilement étendu au champ politique.

Au-delà du conglomérat de Samsung, c’est un solide réseau de corruption qui perdure depuis des décennies en Corée du Sud. D’après le New York Times, au moins six des dix chaebols les plus riches du pays, à l’origine de 80% du PIB, sont dirigés par des patrons aux antécédents judiciaires. Depuis son arrivée au pouvoir en 2013, Park Geun hye a accordé deux fois la grâce présidentielle à des chefs d’entreprises : en 2015, au président du SK Group, Chey Tae-won, puis en 2016 à celui du CJ Group, Lee Jae-hyun. Tous deux avaient été emprisonnés pour corruption, puis pardonnés après avoir fait un don aux fondations de Mme Choi à la demande de la présidente. Les procureurs enquêtant sur l’affaire ont rapporté que Mme Choi utilisa notamment l’argent perçu pour s’acheter une maison et un motel en Allemagne, ainsi que pour la carrière équestre de sa fille.

Le trafic d’influence donnait aux conglomérats des avantages conséquents : allègements fiscaux, taxation à des taux plus faibles que pour les concurrents, factures d’électricité réduites, attribution de licences…  En 2015, SK Group et Lotte avaient perdu leur licence pour gérer des magasins duty-free. A force de lobbying, Lotte a récupéré sa licence en Décembre 2016, lui permettant de ré ouvrir son magasin de téléphone à Séoul, et ravivant à l’occasion son ambition de devenir le leader mondial du secteur de la vente soustraite de taxes.

Park Geun hye est le quatrième chef d’Etat à être convoqué par le Parquet. Depuis la fin de la dictature mise en place par son père Park Chung-hee (1962-1979), et le début de démocratisation du pays, de multiples scandales de corruption ont vu le jour. Les présidents Chun Doo-Hwan (1980-1988) et Roh Tae-Woo (1988-1993) ont été respectivement condamnés à mort et à 22,5 ans de prison pendant la campagne anti-corruption menée à partir de 1993 par le dirigeant Kim Young-sam (1993-1998). Tous deux ont été exemptés de peine en 1998 par le président suivant, Kim Dae-jung (1998-2003), dans une volonté de réconciliation nationale.

En 2009, le suicide de l’ancien président de centre-gauche Roh Moo-Hyun (2004-2008), a une nouvelle fois laissé les Coréens perplexes. Au centre d’une enquête pour corruption, il avait pourtant voué sa campagne à l’assainissement du système politique sud-coréen, capté par les élites. Il aurait accepté plus de 5,5 millions d’euros de pots-de-vin durant son mandat. Avant de mettre fin à ses jours, il s’était excusé publiquement et avait fait son autocritique sur son site web : « Je ne suis plus qualifié pour parler de démocratie, du progrès et de la justice », écrivait-il.

Aujourd’hui, les Coréens sont divisés : des élections anticipées prévues le 9 mai

Le vendredi 10 mars, une grande manifestation de joie a été organisée par les opposants de Park Geun hye sur la place de Gwanghwamun à Séoul. Manifestement, leur engouement n’était pas unanime. Une barrière a du être installée, et 20 000 agents de police mobilisés, en vue d’éviter les affrontements avec les partisans de la présidente rassemblés de l’autre côté. Ceux-ci clament à un complot manigancé par les communistes et craignent un rapprochement avec la Corée du Nord. Ce sont surtout des conservateurs, guidés par une nostalgie de la période de croissance exponentielle du pays sous la dictature du père de l’ex-présidente. Certains indignés ont tenté de franchir les barricades pour atteindre le tribunal, dont 3 au péril de leur vie.

A compter de la destitution de la présidente, la loi donne 60 jours pour désigner un nouveau chef d’Etat. Le premier ministre Hwang Kyo-ahn a été désigné président de facto, en attendant d’être remplacé par celui désigné par les urnes. Il a par ailleurs annoncé qu’il ne se présenterait pas aux élections. Les sondages donnent Moon Jae-in vainqueur de la présidentielle, avec environ 32% d’intentions de vote d’après le groupe de recherche Gallup Korea. Il est l’ex-leader du Parti Démocrate, principale force d’opposition au parti Saenuri, duquel est issue Park Geun hye. Le parti centre-gauche de Moon Jae-In est libéral et démocrate, par contraste avec celui de la présidente, très conservateur. Il s’était déjà présenté à l’élection présidentielle en 2012, où il avait perdu avec  48.02% de bulletins à son nom, contre 51.55% pour Park Geun-hye. Le parti veut évidemment réformer les conglomérats. En seconde place dans les sondages, on retrouve An Hee Jung du parti Minju –centre gauche- avec 17% des voix. Il appelle lui aussi à une économie de marché plus juste et transparente.

Aujourd’hui, la Corée du Sud pourrait bien changer de bord politique. Fragilisés par le Choigate, les membres du Saenuri souhaitent tourner la page du scandale politique, et renommer le parti. Le nom de « Corée libérale » a été proposé. Toutefois, on voit mal comment le groupe pourrait récupérer la confiance des votants quand la grande majorité de la population demande sa dissolution pure et simple.

Un passage à gauche du gouvernement impliquerait une tentative de rapprochement avec le Nord, par le biais d’échanges commerciaux. C’est à nouveau l’éventualité d’une réunification pacifique du pays, divisé depuis 1945, qui est mise en avant.

Le « procès du siècle » est-il réellement un tournant pour le système politique coréen ?

Pourquoi le procès de Park Geun hye serait-il plus décisif que ceux de ses prédécesseurs ? Les anti-Park s’attendent à une peine de prison à vie, expression d’un ras-le-bol général d’un Etat dit « démocratique » depuis à peine 30 ans. Depuis les révélations d’octobre dernier, les réseaux sociaux ont permis non seulement d’organiser d’immenses rassemblements -on retient la manifestation du 12 novembre, qui aurait compté un million de personnes-  mais aussi d’informer le reste du monde des affaires intérieures de la Corée du Sud. On se demande si le prochain président parviendra à tenir ses engagements face au trafic d’influence, quand des millions de wons circulent actuellement entre lobbies et politiciens. Avant le scandale, la Fédération des Industries Coréennes (FKI) comptait près de 600 membres, dont Samsung, Hyundai, SK et LG Group. LG s’est retiré fin 2016, et Samsung l’a imité en février dernier. Toutefois, il improbable de voir ces groupes de pression politique se dissoudre totalement.

« L’élection à venir doit être un point de départ pour le nouveau futur de la Corée” : Les propos du premier ministre Hwang Kyo-ahn illustrent les attentes des citoyens qui se sont sentis trahis par le gouvernement. La corruption n’est toutefois pas le seul sujet sensible au sein de la société coréenne, qui réclame aussi des changements en matière de législation du travail.

Effectivement, avec des semaines pouvant aller jusqu’à 52h, la Corée du Sud est le deuxième pays où l’on travaille le plus après le Mexique. La concurrence pour accéder aux postes de haut rang est rude, et elle se ressent dès l’entrée dans le système scolaire. Rares sont les élèves qui ne suivent pas de cours particuliers. L’obsession de la productivité engendre une pression intense sur les salariés, ce qui explique le fait que le pays soit celui qui compte le plus grand nombre de suicides : près de 50  par jour. Les contestations contre cette culture nationale du travail se font de plus en plus nombreuses, mais n’empêche pas le gouvernement de les réprimer. En juillet 2015, le président de la Confédération Coréenne des Syndicats (KCTU), Han Sang-gyun, était condamné à 5 ans de prison pour avoir mené une « protestation violente » contre la législation anti-travailleurs en novembre 2014.

On ne peut pas dire que la liberté d’expression soit réellement acquise. Le gouvernement tente fréquemment de censurer des œuvres culturelles, à l’instar du documentaire La vérité ne sombrera pas avec le Sewol, qui accuse les autorités d’être responsables du bilan dramatique (plus de 300 morts) du naufrage d’un ferry en avril 2014. Jusqu’ici, le pays du Matin calme n’a pas constitué un exemple en termes de respect des valeurs démocratiques.

En pleine phase de crise diplomatique, la Corée du Sud doit s’organiser pour crédibiliser la fonction présidentielle. Ses relations avec la Chine sont tendues, et son consentement au déploiement du système de défense antimissile américain THAAD (Terminal High Altitude Aera Defense) est perçu comme une menace à la sécurité régionale par Beijing. Ce dispositif a pour but de contrer la menace nucléaire de la Corée du Nord. Les deux principaux candidats à l’élection présidentielle veulent reconsidérer  la présence de l’arme étasunienne, et renouer le dialogue avec Pyongyang. Le candidat Anh Hee-jung a pour sa part déclaré: « Nous réduirons aussi notre dépendance aux États-Unis en termes de Défense nationale, et améliorerons nos capacités d’auto-défense ». Une chose est sûre, le choix auquel seront confrontés les Coréens le 9 mai aura un impact décisif, autant pour les affaires intérieures qu’extérieures.


Crédits infographie : Léo Sylvan et Pierre-Baptiste Borges, pour Les Décryptages

Everything you need to know about the European-Turkish crisis

From Germany to The Netherlands, a spate of cancelled meetings as bone of contention.

Last Sunday, Angela Merkel first decided to cancel meetings in favour of the « yes » vote in the upcoming 16 april’s constitutional referendum. Five days later, it was Switzerland and The Netherlands’ turn to oppose the holding of AKP (Justice and development party) – President Recep Tayyip Erdoğan’s islamic-conservative party – Ministers or MPs rallies, officially to avoid any risk of « public disorder ». It was more than enough for the Turkish President to instantly describe these behaviours as « nazi and fascist ».

As soon as Thursday, Dutch Minister of Foreign affairs Bart Koenders told his Turkish counterpart that « no usual means for a Government visit » would be granted to Turkey’s head of diplomacy. . Following Ankara’s sanction threat following these statements, Dutch Prime Minister Mark Rutte – whose office will be at stake in the context of Thursday, March 15th general elections – announced in a press statement that he purely and simply forbade M. Çavuşoğlu’s flight to land on Dutch soil.

Later this night, as Turkish Minister of Family and Social Policy Mrs Fatma Betül Sayan Kaya managed to reach Rotterdam city centre – where the meeting was initially supposed to take place – against Dutch Government and Rotterdam mayor Ahmed Aboutaleb’s will, she was arrested by the police, a few blocks away from the Turkish Consulate where a tensed demonstration was taking place, before being deported to the German border. A deportation experienced as a new insult by RT Erdoğan, who immediately described Dutch Government as « nazis ». At the same time, about 3,000 kilometres from there, a group of pro-AKP demonstrators who gathered by the Dutch Consulate in Istanbul were replacing the Dutch flag by a Turkish one.

As Danish Prime Minister Lars Løkke Rasmussen announced the postponement of Erdoğan’s visit to Copenhagen, Mevlüt Çavuşoğlu’s day ended in France, more precisely in Metz, where his plane landed shortly after 10PM. The next day, he held a rally there with the local Turkish community, known as a bastion of the MHP (Nationalist movement party), the neo-fascist Turkish party who recently sealed an alliance with Erdoğan’s AKP and which already held a rally there, back in 2012. This meeting took place with the approval of the French Foreign affairs and International development.

” With no sign of a threat to public order, there was no reason to forbid this meeting which, moreover, presented no possibility of interference in French politics.

Facing the current tension between Turkey and several European Union member states, France is calling for appeasement

From French Minister of Foreign affairs and International development’s press release, March 12th 2017.

A recent context enabling the appearance of tensions

It has been a few months already since European-Turkish relations are not at their best. Since the signing of the EU-Turkey migrants deal on March 18th 2016, Ankara has been demanding visa-free travel towards Europe for Turkish citizens, without which they threatened to drop out of the agreement. The deal did provide visa-free travel to Europe for Turkish citizens, but it was conditional on 72 criteria such as the revision of anti-terrorist legislation and the reinforcement of anti-corruption fight, requirements which Turkey does not seem willing to comply with anymore.

Moreover, the constitutional referendum by Erdoğan, which would allow the Turkish President to reinforce his powers and remain in office until 2029, is not the Council of Europe’s cup of tea Indeed, the Venice Commission, which gathers constitutional law experts, fears that such as reform « by suppressing the necessary checks and balances system » could make Turkey « an authoritarian presidential system ». » Furthermore, the constitutional experts consider some of the provisions to be « fundamentally opposed to democratic presidential systems. »

If it were to be passed, the Turkish President would govern without a Prime Minister, name Ministers himself, govern by decrees and could dissolve the Grand National Assembly of Turkey, the Turkish Parliament’s sole chamber, at any time. On the other hand, an impeachment proceeding would be introduced in order for the Head of State to be referred to the Supreme Court if two thirds of MPs decided so.

However the campaign is not taking place in a peaceful atmosphere, because of the purge Recep Tayyip Erdoğan started last summer’s failed coup. Indeed, the numbers are particularly impressive: since last July, around 130,000 public servants have been sacked, 94,000 people have been imprisoned, but also 47,000 arrests, considered as « arbitrary » by the Council of Europe, including 162 journalists, in addition to the 149 media organizations that have been shut down, the 7,300 dismissed academics, the 4,000 judges fired and more than 2,000 educational institutions closed.

These numbers are added to the numerous elected representatives (mayors, MPs and leaders) who were dismissed and imprisoned within the HDP (Peoples’ democratic party), the pro-Kurds party whose co-chair Selahattin Demirtaş  is still behind the bars, and which forms together with CHP (People’s republican party) President Erdoğan’s main democratic opposition.

Despite how difficult this campaign is for the opposition, the latest polls have shown that the « no » would win by a small margin, which makes the postponement of the ballot more and more credible, in order for the Government to secure the result.

However, the Turkish referendum is not the only ballot to take into consideration in the analysis of this diplomatic crisis.

Dutch Prime Minister M. Rutte and German Chancellor A. Merkel both run for re-election this year, and both face the rise of islamophobic far-right in their respective political landscapes: Frauke Petry’s AfD (Alternative for Germany) in Germany and Geert Wilders’s PVV (Party for liberty) in The Netherlands.

Thus, Merkel and Rutte’s decision of prohibiting Erdoğan’s islamic-conservative party’s rallies is not insignificant, since sounds like a response to Petry and Wilders’s accusations of laxity.

According to a poll, The Dutch estimate this was a well-handled diplomatic crisis: 91% of them, from socialist to nationalist voters believe Mark Rutte adopted the right attitude against the Turkish Government

Numerous political reactions in France

While France, in opposition to its European neighbours, decided to allow Mevlüt Çavuşoğlu’s meeting on its soil, reactions for French presidential candidates have been swift. In Fort-de-France, Socialist Party’s candidate Benoît Hamon defended Ministry of Foreign Affairs and International development’s decision: « France’s role is not, a priori, to prohibit a debate »

Conversely, the opposition attacks this choice: according to Florian Philippot, Vice President of far-right party National Front, « the French Government is weak », and there was no reason to « accept this on French soil ». Conservative party Les Républicains’s candidate François Fillon, on his side, considers in a press release that « François Hollande blatantly breaks European solidarity » while Berlin and Amsterdam were « publicly insulted in an indescribable manner ».

At last, En Marche ! centrist candidate Emmanuel Macron reacted on French TV Sunday night, deploring the lack of « common European response » to this crisis. He « would have wished the European Union to ban these rallies. »

Tout comprendre à la crise qui secoue les relations euro-turques

Des ministres turcs expulsés des Pays-Bas, Recep Tayyip Erdoğan qualifiant Merkel et Rutte de « nazis », des candidats à la présidentielle française scandalisés : l’équipe des Décryptages vous aide à comprendre les tensions apparues ces derniers jours entre la Turquie et plusieurs Etats européens.

De l’Allemagne aux Pays-Bas, des annulations de meetings en cascade comme facteur de discorde

Dimanche dernier, c’est la Chancelière allemande Angela Merkel qui la première a pris la décision d’annuler des meetings en faveur du « oui » au référendum constitutionnel du 16 avril prochain. Cinq jours plus tard, c’était au tour de l’Autriche et de la Suisse de s’opposer à la tenue de rassemblements de députés ou de ministres de l’AKP (Parti de la justice et du développement), le parti islamo-conservateur du Président Recep Tayyip Erdoğan, afin officiellement d’éviter tout risque de « trouble à l’ordre public ». Il n’en fallait pas tant au Président turc pour qualifier aussitôt ces agissements de « nazis et fascistes ».

Dès jeudi, le ministre néerlandais des Affaires étrangères, Bert Koenders, indiquait à son homologue turc Mevlüt Çavuşoğlu qu’ « aucun des moyens habituels fournis pour une visite ministérielle » ne seraient octroyés au chef de la diplomatie turque. Suite à la menace de sanctions brandie par Ankara consécutivement à ces déclarations, le Premier Ministre néerlandais Mark Rutte, qui joue sa place lors des élections législatives de ce jeudi 15 mars, annonçait dans un communiqué de presse qu’il interdisait purement et simplement l’atterrissage du vol de M. Çavuşoğlu sur son territoire.

Un peu plus tard dans la nuit, alors que la Ministre turque des Affaires familiales Mme Fatma Betul Sayan Kaya était parvenue à entrer dans la ville de Rotterdam – où devait initialement se tenir ledit meeting – contre l’avis du gouvernement néerlandais et du maire de la ville Ahmed Aboutaleb, cette dernière était appréhendée par la police à quelques rues du consulat turc où se tenait une manifestation tendue, avant que son convoi ne soit reconduit à la frontière allemande. Une expulsion vécue comme un affront de plus par RT Erdoğan, qui qualifia aussitôt le gouvernement néerlandais de « nazi ». Au même moment, à près de 3000 kilomètres de là, des manifestants turcs pro-AKP rassemblés devant le Consulat néerlandais à Istanbul remplaçaient le drapeau hollandais par le pavillon turc.

Pour Mevlüt Çavuşoğlu, alors que le Premier Ministre danois Lars Løkke Rasmussen annonçait le report de la visite d’Erdoğan à Copenhague, la journée s’est achevée en France, plus précisément à Metz, où son avion a atterri peu après 22h. Il y a tenu le lendemain un meeting avec la communauté turque locale, connue pour être un bastion du MHP (Parti d’action nationaliste), le parti néo-fasciste turc désormais allié du gouvernement, qui avait déjà tenu un grand rassemblement en Moselle en 2012 – le tout avec l’aval du Ministère des Affaires étrangères et du Développement international.

En l’absence de menace avérée à l’ordre public, il n’y avait pas de raison d’interdire cette réunion qui, au demeurant, ne présentait aucune possibilité d’ingérence dans la vie politique française.

Face à la tension existant actuellement entre la Turquie et plusieurs Etats membres de l’Union européenne, la France appelle à l’apaisement. Elle invite également les autorités turques à éviter les excès et les provocations. Elle rappelle son attachement aux principes démocratiques.” 

– Extrait du communiqué de presse du Ministère des Affaires étrangères et du Développement international, 12 mars 2017

Un contexte récent propice à l’apparition de tensions

Voilà déjà quelques mois que les relations entre le gouvernement turc et les institutions européennes ne sont pas au beau fixe. Depuis la signature de l’accord UE-Turquie sur les migrants le 18 mars 2016, Ankara réclame la levée de l’obligation de visa pour tout citoyen turc souhaitant entrer en Europe, faute de quoi la Turquie menace de se retirer dudit accord. Ce dernier prévoyait pourtant bien la libéralisation des visas turcs, mais elle était conditionnée à 72 critères dont la révision de la législation anti-terroriste ou encore le renforcement de la lutte contre la corruption, exigences auxquelles le gouvernement d’Erdoğan ne semble aujourd’hui plus enclin à se plier.

De surcroît, le référendum constitutionnel préparé par Erdoğan, qui permettrait au Président turc de renforcer ses pouvoirs et de rester en poste jusqu’en 2029, n’est pas du goût du Conseil de l’Europe. En effet, la Commission de Venise, qui rassemble des experts en droit constitutionnel, craint qu’une telle réforme, « en supprimant le système de contre-pouvoirs nécessaire », ne fasse dériver la Turquie vers « un système présidentiel autoritaire ». En outre, les constitutionnalistes jugent certaines dispositions « fondamentalement contraires aux systèmes présidentiels démocratiques. »

Ce processus de référendum constitutionnel a été accéléré l’été dernier, suite au coup d’Etat avorté du 15 juillet 2016. S’il était adopté, le Président turc gouvernerait sans Premier Ministre, nommerait lui-même les membres de son gouvernement, gouvernerait par décrets et pourrait à tout moment dissoudre la Grande Assemblée nationale de Turquie, seule chambre du Parlement turc. En contrepartie, une procédure de destitution serait mise en place, permettant au chef de l’Etat d’être déféré devant la Cour suprême si tel était le souhait d’au moins 2/3 des parlementaires.

Seulement, la campagne ne se déroule pas dans un climat des plus sereins, puisque suite au putsch avorté de l’été dernier, Recep Tayyip Erdoğan s’est livré à une spectaculaire purge étatique. Les chiffres sont en effet étourdissants : depuis le 15 juillet dernier, l’on dénombre près de 130 000 fonctionnaires limogés, 94 000 emprisonnements, mais aussi près de 47 000 arrestations, jugées par le Conseil de l’Europe comme revêtant « une forme d’arbitraire », dont 162 journalistes, le tout ajouté aux 149 organisations médiatiques fermées par la police, aux 7 300 universitaires révoqués, aux 4 000 juges et procureurs congédiés et aux plus de 2 000 établissements scolaires fermés.

Ces chiffres s’ajoutent aux nombreux élus (maires, députés et cadres) démis et emprisonnés issus du HDP (Parti démocratique des peuples), le parti pro-kurde dont le Président Selahattin Demirtaş est aujourd’hui toujours derrière les barreaux, et qui forme avec les socialistes du CHP (Parti républicain du peuple) la principale opposition démocratique au Président Erdoğan.

Malgré les difficultés que rencontre l’opposition à faire campagne, les derniers sondages indiquent que le « non » l’emporterait d’une courte tête, ce qui laisse planer l’ombre d’un possible report du scrutin par le gouvernement, afin d’en sécuriser le résultat.

Le référendum en Turquie n’est cependant pas le seul scrutin à prendre en compte dans l’analyse de cette crise diplomatique.

En effet, le Premier Ministre néerlandais M. Rutte et la Chancelière allemande A. Merkel visent tous deux la réélection cette année, et font aussi tous deux face à la montée de l’extrême-droite islamophobe dans leurs paysages politiques respectifs: l’AfD (Alternative pour l’Allemagne) de Frauke Petry en Allemagne et le PVV (Parti pour la liberté) de Geert Wilders aux Pays-Bas.

Aussi, la décision de Rutte et Merkel d’interdire ces rassemblements du parti islamo-conservateur d’Erdoğan n’est pas anodine, puisqu’elle sonne comme une réponse aux accusations de laxisme politique portées par Petry et Wilders.

Une gestion de crise diplomatique jugée unanimement réussie par les néerlandais, puisque 91% d’entre eux, des électeurs socialistes aux électeurs nationalistes considèrent que Mark Rutte a adopté la bonne attitude face au gouvernement turc.

De nombreuses réactions politiques en France

Alors que l’Etat français, contrairement à ses voisins européens, a décidé d’autoriser le meeting en France de Mevlüt Çavuşoğlu, les réactions des candidats à l’élection présidentielle ne se sont pas faites attendre. Depuis les Antilles, le candidat du Parti Socialiste Benoit Hamon défend la ligne du Quai d’Orsay : selon lui, « le rôle de la France n’est pas d’interdire a priori un débat ».

A l’inverse, l’opposition fait front : d’après Florian Philippot, Vice-Président du Front National, « le gouvernement français est faible », et il n’y avait aucune raison « d’accepter cela sur le sol français ». Le candidat Les Républicains François Fillon considère lui dans un communiqué de presse que « François Hollande rompt de manière flagrante la solidarité européenne » alors que Berlin et Amsterdam ont été « publiquement insultés de façon inqualifiable ».

Enfin, le candidat d’En Marche ! Emmanuel Macron a réagi dimanche soir, déplorant l’absence de « réponse européenne commune » à cette crise. Il « aurait souhaité que l’Union Européenne interdisse ces meetings ».

Être patriote : ah bon, pourquoi ?

Rejet de l’autre, rétablissement des frontières… le nationalisme a le vent en poupe et le bagage idéologique qu’il porte dans sa cale se répand dans l’opinion publique. En France, l’avancée du Front National démontre le retentissement de ces thèses ; mais le terme de nationalisme ne sied plus à la volonté de dé-diabolisation du parti d’extrême-droite. Il lui est alors préféré le terme de patriotisme, plus rassurant et permettant d’élargir les électeurs potentiels. Là où le nationalisme évoque la violence et l’agressivité, le patriotisme suggère une forme de fraternité au sein d’un même peuple, selon la célèbre phrase de Romain Gary : “Le patriotisme c’est l’amour des siens, le nationalisme c’est la haine des autres”.

Le sentiment patriotique relève tout d’abord d’un lien affectif, de la relation presque intime que l’individu entretient envers son pays ; le mot revêt une dimension sacrificielle, l’idée de placer la défense des intérêts de la patrie comme une cause importante. Le mot est entretenu par des représentations qui stimulent une forme de fierté à l’égard de la patrie. Dans l’imaginaire collectif, le terme de patriote renvoie au héros qui est prêt à mourir pour un intérêt supérieur. L’étymologie du mot nous renseigne sur sa visée : dérivé de pater, le père, il associe la patrie à une grande famille. Instinctivement, la plupart des gens aiment leur famille et seraient prêts à la défendre :  le principe de défense de la patrie est donc naturellement intégré. Mais qu’implique-t-il ?

Dans son discours Patriotisme & Internationalisme, Jaurès s’affirme patriote sans l’opposer à l’internationalisme ; “patriotisme et internationalisme ne sont que deux formes, se complétant, du même amour de l’humanité”. Il considère les patries comme une étape dans l’accomplissement d’une unité humaine. Mais aurions-nous dépassé cette étape ?

Car le patriotisme, au-delà des dérives et instrumentalisations du terme, porte en loin une forme de préférence pour les personnes avec qui nous avons le plus en commun. Si cela peut s’expliquer à l’échelle des sentiments humains, la revendication patriote apparaît comme une barrière toxique à la recherche de l’intérêt général humain.

La mondialisation a nourri ces critiques et même dans les courants de la gauche, à la recherche d’une souveraineté démocratique que le néolibéralisme lui a ôtée. Mais estimer trouver une réponse dans une simple réponse patriotique ne tient pas compte des effets de la mondialisation : elle a profité aux grands groupes industriels et financiers surpuissants, aux intérêts de mêmes minorités privilégiées. La réponse aux effets pervers de la mondialisation ne peut donc pas se trouver dans un repli mais dans l’organisation internationale de luttes sociales : l’humanité plutôt que la patrie. Face à la globalisation des puissants, opposons l’idéal internationaliste et travaillons, peuples mains dans la main, à l’émancipation de tous.

Présidentielles 2017 : on s’intéresse au programme Economique d’En Marche

“De droite et de gauche”. C’est avec une certaine aisance qu’Emmanuel Macron parvient à conforter le mythe : son programme économique est d’un nouveau genre. Présenté en deux temps (une première partie de celui-ci ayant d’abord été annoncée ici, puis le reste ), le programme de celui qui se définissait comme le “candidat du travail” et “des classes moyennes et populaires” peut se résumer en quatre idées-phares.

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I-Télé, la mal-aimée

Mal aimée par sa direction, boudée par les téléspectateurs, I-Télé a tiré sa révérence le 27 février dernier. C’est au petit matin qu’un jingle d’une vingtaine de secondes mit fin, laconiquement, à 17 années d’information en continu. Retour sur les derniers soupirs de la chaîne où «l’information ne s’arrête jamais».


L’antithèse de BFMTV.

I-Télé n’a jamais pu durablement devancer sa grande rivale BFMTV, aussi bien en audiences qu’en termes de rentabilité. Depuis 2005, date à laquelle elle rejoignit la TNT, I-Télé n’a cessé de prendre des virages éditoriaux, au grès des changements d’organigramme du groupe Canal +.

Cette stratégie, fructueuse en 2006, n’a permis à la chaîne que d’être leader, en l’espace de quelques mois, en part de marché sur la TNT. Excepté en 2010, où la chaîne au logo triangulaire devint leader pendant 1 mois, BFMTV a pris soin de distancer cette dernière, d’abord d’un dixième puis de plusieurs pour cent de part de marché.

Ce n’est qu’à partir de 2012, qu’I-Télé stabilise sa grille, et fixe sa cible, avec la nomination de Cécilia Ragueneau et Céline Pigalle à la tête de la chaîne. Elle entendait alors se différencier de sa principale concurrente en misant sur des décryptages et des débats quand BFMTV faisait part belle au « Hard-News ». Malgré de beaux discours, I-Télé n’a pu s’empêcher de revenir sur ce qui faisait le succès de sa concurrente, en réduisant les débats et en se recentrant sur l’information en continu.

On ne compte plus les changements de slogans et de plateaux. I-Télé se cherche et ne se trouve pas. Elle demeure l’antithèse de BFMTV, perdue dans sa recherche d’identité, comme boudée par les téléspectateurs. 


 
2015, le début de la fin.

En 2015, après avoir pris la tête du conseil de surveillance du groupe Vivendi, maison mère de Canal+, Vincent Bolloré entre, en grande pompe, à coup de licenciements à la tête du groupe Canal +. Il décide d’un brutal régime d’amaigrissement budgétaire de la chaîne mère dans un premier temps : des émissions historiques passent à la trappe en même temps que l’organigramme du groupe.

I-Télé ne subit pas directement les cures du milliardaire breton. En effet, ce dernier se targue de faire annoncer qu’il « ne sait pas quoi faire d’I-Télé » ou encore que dans « sa stratégie, l’information n’a pas de place ». La rédaction patiente dans ces heures de latences, comme un condamné à mort qui monte sur sa potence.

Dans ce contexte, déjà tendu, ce n’est pas un, mais deux nouveaux concurrents qui entrent dans ce marché ô combien concurrentiel. LCI, première chaîne d’information historique du pays se voit accordé un canal de la TNT en avril 2016. FranceInfo, énième chaîne du service public, est annoncée pour le mois de septembre de la même année. Toutes font la sempiternelle promesse d’un traitement différent de l’actualité.

Une reprise en main musclée.

Il n’en fallait pas moins pour que les tentacules du Tycoon breton s’arrêtent sur I-Télé.
Exit Céline Pigalle et Cécilia Ragueneau, place à des proches de Vincent Bolloré.

Guillaume Zeller, numéro un de la chaîne, arrive tout droit de Direct Matin, journal appartenant au groupe Bolloré. Lors des premières rencontres avec la rédaction, il prononce une phrase qui est censée apaiser un climat déjà tendu : « Je suis là pour apprendre de vous ». Difficile pour lui de masquer son manque d’expérience : passer d’une équipe s’occupant de la rédaction d’une revue pleine de réclame, à la tête d’une chaîne nationale n’est pas une mince affaire. I-Télé se retrouve, en outre, dirigée par un soutien assumé d’une frange catholique traditionaliste qui parfois ne refuse pas quelques interventions sur la chaîne controversée « Radio Courtoisie ».

La numéro deux de la rédaction se prénomme Virginie Chomicki, future tête de gondole de CNEWS, elle est se retrouve décriée par ses anciens collègues de LCI qui l’estime incapable de diriger une telle équipe après avoir effectué quelques chroniques à l’antenne. Guillaume Zeller est rapidement remplacé par Serge Nedjar, en mai 2016. Ce dernier est alors président de « Bolloré Média Régie ».
C’est un nouveau fidèle qui prend la tête d’I-Télé. Réputé cassant, il n’hésite pas à asséner devant la rédaction « Je serai l’homme à abattre, celui que vous allez détester ». Son but, multiplier les synergies avec les filiales achetées par Bolloré. Après le rachat de Gameloftpar Vivendi, il n’hésite pas à demander aux journalistes de couvrir une conférence de presse de la firme spécialisée dans le digital. Selon lesJours.fr, il serait allé jusqu’à censurer un reportage sur l’affaire Fillon, au matin sa publication par le Canard enchainé.

Enfin Philippe Labro est une ancienne connaissance de Vincent Bolloré. Il avait notamment participé au lancement de la chaîne Direct 8, alors propriété de Bolloré, actuel chef du groupe Canal + avant d’être revendue…à Canal +. Triste revanche.


Une grève sans précédent.

Une autre star de Direct 8, devrait également faire son apparition : Jean-Marc Morandini. Il avait contribué au succès de la chaîne notamment avec son émission média qu’il avait humblement appelée « Morandini ». C’est cette recrue qui fait exploser la rédaction en proie aux licenciements et à la diète budgétaire. En effet, Jean-Marc Morandini est empêtré dans une affaire de corruption de mineur aggravé. Les méthodes « journalistiques » de Jean-Marc Morandini ne correspondent pas, par ailleurs, à l’identité de la chaîne pour certains de ses confrères. 

C’est pendant 31 jours de grève que la majorité de la rédaction manifestera son désaccord concernant l’arrivée de Jean-Marc Morandini à l’antenne. Une assurance d’indépendance de la rédaction est dans le même temps demandée. I-Télé devient entre-temps une chaîne documentaire où des rediffusions de reportages Canal + tournent en boucle.

 Il n’en est rien. 31 jours de grèves, près de 80 départs, une élection américaine non couverte, des pertes de points de part de marché, des journées de pleurs, de peur de la précarité, n’auront servi à rien. Le soutien de personnalités du monde politique et médiatique n’ont rien bouleversé : ni l’intervention de la ministre du Travail Myriam El Khomri, ni le soutient d’une majorité de leurs confrères ont pu changer la donne.  Le message de Vincent Bolloré est clair : « Vous obéissez, ou vous dégagez ».

 La plus longue des grèves de l’histoire de l’audiovisuel français depuis 1968, qui frappait alors l’ORTF, n’aura pas permis la signature d’une charte éthique, ni la mise en retrait durable de l’antenne de Jean-Marc Morandini.


Nouveau look pour une nouvelle vie ?

À son arrivée, Vincent Bolloré annonce un rebranding total des chaînes du pôle gratuit du groupe. I-Télé n’est pas une étoile de « la galaxie Canal », elle deviendra donc CNEWS.

Annoncée d’abord en septembre 2016, elle sera, suite à la grève, repoussée au 27 février dernier. Une révolution est annoncée pour faire table rase du passé : ce sera « une chaîne d’infos de décryptage où les différentes opinions peuvent s’exprimer » disait alors Gérald Brice-Viret, directeur général du groupe. 
On annonce l’arrivée de vieilles gloires du PAF (Paysage Audiovisuel Français) à l’instar de Jean-Pierre Elkabbach, dernièrement évincé d’Europe 1. Patrick Poivre d’Arvor, Rachid Arhab, Marc Menant : moyenne d’âge 70 ans.

Autre les recrues d’un autre temps, CNEWS, se démarque d’I-Télé par ses nouveaux débats, où il est question de “pénoplastie”, de franc-maçonnerie ou encore d’immigration.
Le spectre de Jean-Marc Morandini est bien présent : C-RACOLLEUR.
Les journalistes de CNEWS continuent d’alimenter une chaîne qui tourne encore au ralenti. Un ralenti qui profite à l’une de ses concurrentes ; chaîne d’information du groupe Bouygues, LCI, a pu égaliser CNEWS en part d’audience.


La direction du groupe s’est donnée 3 ans pour trouver l’équilibre financier, en maintenant un cout de grille de 20 à 30 millions d’euros : le pari est lancé.