Destitution de la présidente sud-coréenne: et après ?

Destitution de la présidente sud-coréenne: et après ?

Pour bien comprendre les relations entre les différents acteurs avant de commencer la lecture de l’article, nous vous proposons cette infographie :


Le vendredi 10 mars, la Cour Constitutionnelle sud-coréenne destituait la présidente Park Geun hye, validant le vote du Parlement de décembre dernier. Voilà trois mois que les Coréens manifestaient tous les samedis sur la place de Guanghwamun à Séoul, dans l’attente de cette décision. Prise dans un scandale de corruption, elle et sa confidente Choi Soon-sil auraient perçu l’équivalent de 62 millions d’euros des chaebols (grands groupes industriels coréens), dans le but d’orienter la politique du pays dans le sens des entreprises…

Qu’est-ce que le Choigate? Comment l’affaire a-t-elle été révélée au grand jour ?

En octobre dernier, la chaîne de télévision sud-coréenne JTBC révélait l’amitié de longue date de Park Geun hye et Choi Soon-sil, une femme d’affaires méconnue qui s’avérait diriger le pays dans l’ombre. Un reporter a épié l’ordinateur de Mme Choi, dans lequel se trouvaient des  brouillons de discours de la présidente, une carte routière de la Corée du Nord, mais aussi des dossiers sur les remaniements ministériels. En Corée du Sud, la possession illégale de ces informations fait encourir jusqu’à sept ans de prison et une amende de 16 400 euros.

Par la suite ont été découverts les versements phénoménaux que percevaient les fondations fictives de Choi Soon-sil, présentées comme promouvant des activités « culturelles et sportives »,  tel que la  « K-sport foundation » ou la « M-Ru foundation ». Or, ces donations n’avaient pas de visée caritative. Elles ont en réalité servi l’intérêt personnel du couple le plus puissant et paradoxalement invisible du pays : Mme Choi et son ex-mari  Chung Yoon-hoi, membre du staff de la présidente alors qu’elle était législatrice de 1998 à 2004. Park Geun hye ne passait qu’au second plan dans la prise de décisions.

La nouvelle a été d’autant plus choquante, que celle surnommée « Raspoutine » n’est autre que la fille de Choi Tae-Min, leader autoproclamé de « l’Église de la vie éternelle » : une secte chamanique. Il aurait influencé la présidente durant des années, puisqu’il était déjà proche de son père, l’ancien dictateur Park Chung-hee (1962-1979).

Parmi les entreprises impliquées dans ce trafic d’influence, le leader mondial coréen de la vente de téléphone mobile Samsung, a fait la une des journaux. Son PDG, Lee Jay Yong, a été arrêté le 17 février, puis mis en examen pour corruption et détournement de fonds. En 2014, « L’héritier de l’empire Samsung » prenait la place de son père Lee Jun-hee -victime d’une crise cardiaque-  en tant que numéro un du géant commercial. Le groupe aurait versé jusqu’à l’équivalent de 37 millions d’euros  à la présidente. Lee Jay Yong a admis les transactions, mais a nié avoir cherché à exercer une quelconque influence politique.

Une corruption profondément ancrée dans la société coréenne

A l’époque où il dirigeait encore Samsung, Lee Jun-hee a lui-même été accusé de corruption et condamné à trois années de prison à deux reprises : la première fois en 2008 pour évasion fiscale et création d’un fonds secret de 182 millions d’euros, finançant la complaisance des membres du gouvernement et d’hommes politiques ; la deuxième pour abus de confiance en vue de faciliter un transfert de pouvoir illégal à son fils. Cependant, le puissant homme d’affaires n’a jamais purgé ses peines, et ce au nom de « l’intérêt économique national ». En effet, Samsung est indispensable à l’économie sud-coréenne. Moteur de la reconstruction du pays, qui était des plus démunis au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le groupe a participé à sa croissance phénoménale, le menant au rang de quatrième économie d’Asie.  18e au classement des entreprises publiques les plus riches en 2016 selon le magazine Forbes, il a cette année fait un chiffre d’affaires de 222 milliards d’euros et était à l’origine de 20% des exportations nationales. Le pouvoir de ses dirigeants s’est facilement étendu au champ politique.

Au-delà du conglomérat de Samsung, c’est un solide réseau de corruption qui perdure depuis des décennies en Corée du Sud. D’après le New York Times, au moins six des dix chaebols les plus riches du pays, à l’origine de 80% du PIB, sont dirigés par des patrons aux antécédents judiciaires. Depuis son arrivée au pouvoir en 2013, Park Geun hye a accordé deux fois la grâce présidentielle à des chefs d’entreprises : en 2015, au président du SK Group, Chey Tae-won, puis en 2016 à celui du CJ Group, Lee Jae-hyun. Tous deux avaient été emprisonnés pour corruption, puis pardonnés après avoir fait un don aux fondations de Mme Choi à la demande de la présidente. Les procureurs enquêtant sur l’affaire ont rapporté que Mme Choi utilisa notamment l’argent perçu pour s’acheter une maison et un motel en Allemagne, ainsi que pour la carrière équestre de sa fille.

Le trafic d’influence donnait aux conglomérats des avantages conséquents : allègements fiscaux, taxation à des taux plus faibles que pour les concurrents, factures d’électricité réduites, attribution de licences…  En 2015, SK Group et Lotte avaient perdu leur licence pour gérer des magasins duty-free. A force de lobbying, Lotte a récupéré sa licence en Décembre 2016, lui permettant de ré ouvrir son magasin de téléphone à Séoul, et ravivant à l’occasion son ambition de devenir le leader mondial du secteur de la vente soustraite de taxes.

Park Geun hye est le quatrième chef d’Etat à être convoqué par le Parquet. Depuis la fin de la dictature mise en place par son père Park Chung-hee (1962-1979), et le début de démocratisation du pays, de multiples scandales de corruption ont vu le jour. Les présidents Chun Doo-Hwan (1980-1988) et Roh Tae-Woo (1988-1993) ont été respectivement condamnés à mort et à 22,5 ans de prison pendant la campagne anti-corruption menée à partir de 1993 par le dirigeant Kim Young-sam (1993-1998). Tous deux ont été exemptés de peine en 1998 par le président suivant, Kim Dae-jung (1998-2003), dans une volonté de réconciliation nationale.

En 2009, le suicide de l’ancien président de centre-gauche Roh Moo-Hyun (2004-2008), a une nouvelle fois laissé les Coréens perplexes. Au centre d’une enquête pour corruption, il avait pourtant voué sa campagne à l’assainissement du système politique sud-coréen, capté par les élites. Il aurait accepté plus de 5,5 millions d’euros de pots-de-vin durant son mandat. Avant de mettre fin à ses jours, il s’était excusé publiquement et avait fait son autocritique sur son site web : « Je ne suis plus qualifié pour parler de démocratie, du progrès et de la justice », écrivait-il.

Aujourd’hui, les Coréens sont divisés : des élections anticipées prévues le 9 mai

Le vendredi 10 mars, une grande manifestation de joie a été organisée par les opposants de Park Geun hye sur la place de Gwanghwamun à Séoul. Manifestement, leur engouement n’était pas unanime. Une barrière a du être installée, et 20 000 agents de police mobilisés, en vue d’éviter les affrontements avec les partisans de la présidente rassemblés de l’autre côté. Ceux-ci clament à un complot manigancé par les communistes et craignent un rapprochement avec la Corée du Nord. Ce sont surtout des conservateurs, guidés par une nostalgie de la période de croissance exponentielle du pays sous la dictature du père de l’ex-présidente. Certains indignés ont tenté de franchir les barricades pour atteindre le tribunal, dont 3 au péril de leur vie.

A compter de la destitution de la présidente, la loi donne 60 jours pour désigner un nouveau chef d’Etat. Le premier ministre Hwang Kyo-ahn a été désigné président de facto, en attendant d’être remplacé par celui désigné par les urnes. Il a par ailleurs annoncé qu’il ne se présenterait pas aux élections. Les sondages donnent Moon Jae-in vainqueur de la présidentielle, avec environ 32% d’intentions de vote d’après le groupe de recherche Gallup Korea. Il est l’ex-leader du Parti Démocrate, principale force d’opposition au parti Saenuri, duquel est issue Park Geun hye. Le parti centre-gauche de Moon Jae-In est libéral et démocrate, par contraste avec celui de la présidente, très conservateur. Il s’était déjà présenté à l’élection présidentielle en 2012, où il avait perdu avec  48.02% de bulletins à son nom, contre 51.55% pour Park Geun-hye. Le parti veut évidemment réformer les conglomérats. En seconde place dans les sondages, on retrouve An Hee Jung du parti Minju –centre gauche- avec 17% des voix. Il appelle lui aussi à une économie de marché plus juste et transparente.

Aujourd’hui, la Corée du Sud pourrait bien changer de bord politique. Fragilisés par le Choigate, les membres du Saenuri souhaitent tourner la page du scandale politique, et renommer le parti. Le nom de « Corée libérale » a été proposé. Toutefois, on voit mal comment le groupe pourrait récupérer la confiance des votants quand la grande majorité de la population demande sa dissolution pure et simple.

Un passage à gauche du gouvernement impliquerait une tentative de rapprochement avec le Nord, par le biais d’échanges commerciaux. C’est à nouveau l’éventualité d’une réunification pacifique du pays, divisé depuis 1945, qui est mise en avant.

Le « procès du siècle » est-il réellement un tournant pour le système politique coréen ?

Pourquoi le procès de Park Geun hye serait-il plus décisif que ceux de ses prédécesseurs ? Les anti-Park s’attendent à une peine de prison à vie, expression d’un ras-le-bol général d’un Etat dit « démocratique » depuis à peine 30 ans. Depuis les révélations d’octobre dernier, les réseaux sociaux ont permis non seulement d’organiser d’immenses rassemblements -on retient la manifestation du 12 novembre, qui aurait compté un million de personnes-  mais aussi d’informer le reste du monde des affaires intérieures de la Corée du Sud. On se demande si le prochain président parviendra à tenir ses engagements face au trafic d’influence, quand des millions de wons circulent actuellement entre lobbies et politiciens. Avant le scandale, la Fédération des Industries Coréennes (FKI) comptait près de 600 membres, dont Samsung, Hyundai, SK et LG Group. LG s’est retiré fin 2016, et Samsung l’a imité en février dernier. Toutefois, il improbable de voir ces groupes de pression politique se dissoudre totalement.

« L’élection à venir doit être un point de départ pour le nouveau futur de la Corée” : Les propos du premier ministre Hwang Kyo-ahn illustrent les attentes des citoyens qui se sont sentis trahis par le gouvernement. La corruption n’est toutefois pas le seul sujet sensible au sein de la société coréenne, qui réclame aussi des changements en matière de législation du travail.

Effectivement, avec des semaines pouvant aller jusqu’à 52h, la Corée du Sud est le deuxième pays où l’on travaille le plus après le Mexique. La concurrence pour accéder aux postes de haut rang est rude, et elle se ressent dès l’entrée dans le système scolaire. Rares sont les élèves qui ne suivent pas de cours particuliers. L’obsession de la productivité engendre une pression intense sur les salariés, ce qui explique le fait que le pays soit celui qui compte le plus grand nombre de suicides : près de 50  par jour. Les contestations contre cette culture nationale du travail se font de plus en plus nombreuses, mais n’empêche pas le gouvernement de les réprimer. En juillet 2015, le président de la Confédération Coréenne des Syndicats (KCTU), Han Sang-gyun, était condamné à 5 ans de prison pour avoir mené une « protestation violente » contre la législation anti-travailleurs en novembre 2014.

On ne peut pas dire que la liberté d’expression soit réellement acquise. Le gouvernement tente fréquemment de censurer des œuvres culturelles, à l’instar du documentaire La vérité ne sombrera pas avec le Sewol, qui accuse les autorités d’être responsables du bilan dramatique (plus de 300 morts) du naufrage d’un ferry en avril 2014. Jusqu’ici, le pays du Matin calme n’a pas constitué un exemple en termes de respect des valeurs démocratiques.

En pleine phase de crise diplomatique, la Corée du Sud doit s’organiser pour crédibiliser la fonction présidentielle. Ses relations avec la Chine sont tendues, et son consentement au déploiement du système de défense antimissile américain THAAD (Terminal High Altitude Aera Defense) est perçu comme une menace à la sécurité régionale par Beijing. Ce dispositif a pour but de contrer la menace nucléaire de la Corée du Nord. Les deux principaux candidats à l’élection présidentielle veulent reconsidérer  la présence de l’arme étasunienne, et renouer le dialogue avec Pyongyang. Le candidat Anh Hee-jung a pour sa part déclaré: « Nous réduirons aussi notre dépendance aux États-Unis en termes de Défense nationale, et améliorerons nos capacités d’auto-défense ». Une chose est sûre, le choix auquel seront confrontés les Coréens le 9 mai aura un impact décisif, autant pour les affaires intérieures qu’extérieures.


Crédits infographie : Léo Sylvan et Pierre-Baptiste Borges, pour Les Décryptages

Everything you need to know about the European-Turkish crisis

From Germany to The Netherlands, a spate of cancelled meetings as bone of contention.

Last Sunday, Angela Merkel first decided to cancel meetings in favour of the « yes » vote in the upcoming 16 april’s constitutional referendum. Five days later, it was Switzerland and The Netherlands’ turn to oppose the holding of AKP (Justice and development party) – President Recep Tayyip Erdoğan’s islamic-conservative party – Ministers or MPs rallies, officially to avoid any risk of « public disorder ». It was more than enough for the Turkish President to instantly describe these behaviours as « nazi and fascist ».

As soon as Thursday, Dutch Minister of Foreign affairs Bart Koenders told his Turkish counterpart that « no usual means for a Government visit » would be granted to Turkey’s head of diplomacy. . Following Ankara’s sanction threat following these statements, Dutch Prime Minister Mark Rutte – whose office will be at stake in the context of Thursday, March 15th general elections – announced in a press statement that he purely and simply forbade M. Çavuşoğlu’s flight to land on Dutch soil.

Later this night, as Turkish Minister of Family and Social Policy Mrs Fatma Betül Sayan Kaya managed to reach Rotterdam city centre – where the meeting was initially supposed to take place – against Dutch Government and Rotterdam mayor Ahmed Aboutaleb’s will, she was arrested by the police, a few blocks away from the Turkish Consulate where a tensed demonstration was taking place, before being deported to the German border. A deportation experienced as a new insult by RT Erdoğan, who immediately described Dutch Government as « nazis ». At the same time, about 3,000 kilometres from there, a group of pro-AKP demonstrators who gathered by the Dutch Consulate in Istanbul were replacing the Dutch flag by a Turkish one.

As Danish Prime Minister Lars Løkke Rasmussen announced the postponement of Erdoğan’s visit to Copenhagen, Mevlüt Çavuşoğlu’s day ended in France, more precisely in Metz, where his plane landed shortly after 10PM. The next day, he held a rally there with the local Turkish community, known as a bastion of the MHP (Nationalist movement party), the neo-fascist Turkish party who recently sealed an alliance with Erdoğan’s AKP and which already held a rally there, back in 2012. This meeting took place with the approval of the French Foreign affairs and International development.

” With no sign of a threat to public order, there was no reason to forbid this meeting which, moreover, presented no possibility of interference in French politics.

Facing the current tension between Turkey and several European Union member states, France is calling for appeasement

From French Minister of Foreign affairs and International development’s press release, March 12th 2017.

A recent context enabling the appearance of tensions

It has been a few months already since European-Turkish relations are not at their best. Since the signing of the EU-Turkey migrants deal on March 18th 2016, Ankara has been demanding visa-free travel towards Europe for Turkish citizens, without which they threatened to drop out of the agreement. The deal did provide visa-free travel to Europe for Turkish citizens, but it was conditional on 72 criteria such as the revision of anti-terrorist legislation and the reinforcement of anti-corruption fight, requirements which Turkey does not seem willing to comply with anymore.

Moreover, the constitutional referendum by Erdoğan, which would allow the Turkish President to reinforce his powers and remain in office until 2029, is not the Council of Europe’s cup of tea Indeed, the Venice Commission, which gathers constitutional law experts, fears that such as reform « by suppressing the necessary checks and balances system » could make Turkey « an authoritarian presidential system ». » Furthermore, the constitutional experts consider some of the provisions to be « fundamentally opposed to democratic presidential systems. »

If it were to be passed, the Turkish President would govern without a Prime Minister, name Ministers himself, govern by decrees and could dissolve the Grand National Assembly of Turkey, the Turkish Parliament’s sole chamber, at any time. On the other hand, an impeachment proceeding would be introduced in order for the Head of State to be referred to the Supreme Court if two thirds of MPs decided so.

However the campaign is not taking place in a peaceful atmosphere, because of the purge Recep Tayyip Erdoğan started last summer’s failed coup. Indeed, the numbers are particularly impressive: since last July, around 130,000 public servants have been sacked, 94,000 people have been imprisoned, but also 47,000 arrests, considered as « arbitrary » by the Council of Europe, including 162 journalists, in addition to the 149 media organizations that have been shut down, the 7,300 dismissed academics, the 4,000 judges fired and more than 2,000 educational institutions closed.

These numbers are added to the numerous elected representatives (mayors, MPs and leaders) who were dismissed and imprisoned within the HDP (Peoples’ democratic party), the pro-Kurds party whose co-chair Selahattin Demirtaş  is still behind the bars, and which forms together with CHP (People’s republican party) President Erdoğan’s main democratic opposition.

Despite how difficult this campaign is for the opposition, the latest polls have shown that the « no » would win by a small margin, which makes the postponement of the ballot more and more credible, in order for the Government to secure the result.

However, the Turkish referendum is not the only ballot to take into consideration in the analysis of this diplomatic crisis.

Dutch Prime Minister M. Rutte and German Chancellor A. Merkel both run for re-election this year, and both face the rise of islamophobic far-right in their respective political landscapes: Frauke Petry’s AfD (Alternative for Germany) in Germany and Geert Wilders’s PVV (Party for liberty) in The Netherlands.

Thus, Merkel and Rutte’s decision of prohibiting Erdoğan’s islamic-conservative party’s rallies is not insignificant, since sounds like a response to Petry and Wilders’s accusations of laxity.

According to a poll, The Dutch estimate this was a well-handled diplomatic crisis: 91% of them, from socialist to nationalist voters believe Mark Rutte adopted the right attitude against the Turkish Government

Numerous political reactions in France

While France, in opposition to its European neighbours, decided to allow Mevlüt Çavuşoğlu’s meeting on its soil, reactions for French presidential candidates have been swift. In Fort-de-France, Socialist Party’s candidate Benoît Hamon defended Ministry of Foreign Affairs and International development’s decision: « France’s role is not, a priori, to prohibit a debate »

Conversely, the opposition attacks this choice: according to Florian Philippot, Vice President of far-right party National Front, « the French Government is weak », and there was no reason to « accept this on French soil ». Conservative party Les Républicains’s candidate François Fillon, on his side, considers in a press release that « François Hollande blatantly breaks European solidarity » while Berlin and Amsterdam were « publicly insulted in an indescribable manner ».

At last, En Marche ! centrist candidate Emmanuel Macron reacted on French TV Sunday night, deploring the lack of « common European response » to this crisis. He « would have wished the European Union to ban these rallies. »

Tout comprendre à la crise qui secoue les relations euro-turques

Des ministres turcs expulsés des Pays-Bas, Recep Tayyip Erdoğan qualifiant Merkel et Rutte de « nazis », des candidats à la présidentielle française scandalisés : l’équipe des Décryptages vous aide à comprendre les tensions apparues ces derniers jours entre la Turquie et plusieurs Etats européens.

De l’Allemagne aux Pays-Bas, des annulations de meetings en cascade comme facteur de discorde

Dimanche dernier, c’est la Chancelière allemande Angela Merkel qui la première a pris la décision d’annuler des meetings en faveur du « oui » au référendum constitutionnel du 16 avril prochain. Cinq jours plus tard, c’était au tour de l’Autriche et de la Suisse de s’opposer à la tenue de rassemblements de députés ou de ministres de l’AKP (Parti de la justice et du développement), le parti islamo-conservateur du Président Recep Tayyip Erdoğan, afin officiellement d’éviter tout risque de « trouble à l’ordre public ». Il n’en fallait pas tant au Président turc pour qualifier aussitôt ces agissements de « nazis et fascistes ».

Dès jeudi, le ministre néerlandais des Affaires étrangères, Bert Koenders, indiquait à son homologue turc Mevlüt Çavuşoğlu qu’ « aucun des moyens habituels fournis pour une visite ministérielle » ne seraient octroyés au chef de la diplomatie turque. Suite à la menace de sanctions brandie par Ankara consécutivement à ces déclarations, le Premier Ministre néerlandais Mark Rutte, qui joue sa place lors des élections législatives de ce jeudi 15 mars, annonçait dans un communiqué de presse qu’il interdisait purement et simplement l’atterrissage du vol de M. Çavuşoğlu sur son territoire.

Un peu plus tard dans la nuit, alors que la Ministre turque des Affaires familiales Mme Fatma Betul Sayan Kaya était parvenue à entrer dans la ville de Rotterdam – où devait initialement se tenir ledit meeting – contre l’avis du gouvernement néerlandais et du maire de la ville Ahmed Aboutaleb, cette dernière était appréhendée par la police à quelques rues du consulat turc où se tenait une manifestation tendue, avant que son convoi ne soit reconduit à la frontière allemande. Une expulsion vécue comme un affront de plus par RT Erdoğan, qui qualifia aussitôt le gouvernement néerlandais de « nazi ». Au même moment, à près de 3000 kilomètres de là, des manifestants turcs pro-AKP rassemblés devant le Consulat néerlandais à Istanbul remplaçaient le drapeau hollandais par le pavillon turc.

Pour Mevlüt Çavuşoğlu, alors que le Premier Ministre danois Lars Løkke Rasmussen annonçait le report de la visite d’Erdoğan à Copenhague, la journée s’est achevée en France, plus précisément à Metz, où son avion a atterri peu après 22h. Il y a tenu le lendemain un meeting avec la communauté turque locale, connue pour être un bastion du MHP (Parti d’action nationaliste), le parti néo-fasciste turc désormais allié du gouvernement, qui avait déjà tenu un grand rassemblement en Moselle en 2012 – le tout avec l’aval du Ministère des Affaires étrangères et du Développement international.

En l’absence de menace avérée à l’ordre public, il n’y avait pas de raison d’interdire cette réunion qui, au demeurant, ne présentait aucune possibilité d’ingérence dans la vie politique française.

Face à la tension existant actuellement entre la Turquie et plusieurs Etats membres de l’Union européenne, la France appelle à l’apaisement. Elle invite également les autorités turques à éviter les excès et les provocations. Elle rappelle son attachement aux principes démocratiques.” 

– Extrait du communiqué de presse du Ministère des Affaires étrangères et du Développement international, 12 mars 2017

Un contexte récent propice à l’apparition de tensions

Voilà déjà quelques mois que les relations entre le gouvernement turc et les institutions européennes ne sont pas au beau fixe. Depuis la signature de l’accord UE-Turquie sur les migrants le 18 mars 2016, Ankara réclame la levée de l’obligation de visa pour tout citoyen turc souhaitant entrer en Europe, faute de quoi la Turquie menace de se retirer dudit accord. Ce dernier prévoyait pourtant bien la libéralisation des visas turcs, mais elle était conditionnée à 72 critères dont la révision de la législation anti-terroriste ou encore le renforcement de la lutte contre la corruption, exigences auxquelles le gouvernement d’Erdoğan ne semble aujourd’hui plus enclin à se plier.

De surcroît, le référendum constitutionnel préparé par Erdoğan, qui permettrait au Président turc de renforcer ses pouvoirs et de rester en poste jusqu’en 2029, n’est pas du goût du Conseil de l’Europe. En effet, la Commission de Venise, qui rassemble des experts en droit constitutionnel, craint qu’une telle réforme, « en supprimant le système de contre-pouvoirs nécessaire », ne fasse dériver la Turquie vers « un système présidentiel autoritaire ». En outre, les constitutionnalistes jugent certaines dispositions « fondamentalement contraires aux systèmes présidentiels démocratiques. »

Ce processus de référendum constitutionnel a été accéléré l’été dernier, suite au coup d’Etat avorté du 15 juillet 2016. S’il était adopté, le Président turc gouvernerait sans Premier Ministre, nommerait lui-même les membres de son gouvernement, gouvernerait par décrets et pourrait à tout moment dissoudre la Grande Assemblée nationale de Turquie, seule chambre du Parlement turc. En contrepartie, une procédure de destitution serait mise en place, permettant au chef de l’Etat d’être déféré devant la Cour suprême si tel était le souhait d’au moins 2/3 des parlementaires.

Seulement, la campagne ne se déroule pas dans un climat des plus sereins, puisque suite au putsch avorté de l’été dernier, Recep Tayyip Erdoğan s’est livré à une spectaculaire purge étatique. Les chiffres sont en effet étourdissants : depuis le 15 juillet dernier, l’on dénombre près de 130 000 fonctionnaires limogés, 94 000 emprisonnements, mais aussi près de 47 000 arrestations, jugées par le Conseil de l’Europe comme revêtant « une forme d’arbitraire », dont 162 journalistes, le tout ajouté aux 149 organisations médiatiques fermées par la police, aux 7 300 universitaires révoqués, aux 4 000 juges et procureurs congédiés et aux plus de 2 000 établissements scolaires fermés.

Ces chiffres s’ajoutent aux nombreux élus (maires, députés et cadres) démis et emprisonnés issus du HDP (Parti démocratique des peuples), le parti pro-kurde dont le Président Selahattin Demirtaş est aujourd’hui toujours derrière les barreaux, et qui forme avec les socialistes du CHP (Parti républicain du peuple) la principale opposition démocratique au Président Erdoğan.

Malgré les difficultés que rencontre l’opposition à faire campagne, les derniers sondages indiquent que le « non » l’emporterait d’une courte tête, ce qui laisse planer l’ombre d’un possible report du scrutin par le gouvernement, afin d’en sécuriser le résultat.

Le référendum en Turquie n’est cependant pas le seul scrutin à prendre en compte dans l’analyse de cette crise diplomatique.

En effet, le Premier Ministre néerlandais M. Rutte et la Chancelière allemande A. Merkel visent tous deux la réélection cette année, et font aussi tous deux face à la montée de l’extrême-droite islamophobe dans leurs paysages politiques respectifs: l’AfD (Alternative pour l’Allemagne) de Frauke Petry en Allemagne et le PVV (Parti pour la liberté) de Geert Wilders aux Pays-Bas.

Aussi, la décision de Rutte et Merkel d’interdire ces rassemblements du parti islamo-conservateur d’Erdoğan n’est pas anodine, puisqu’elle sonne comme une réponse aux accusations de laxisme politique portées par Petry et Wilders.

Une gestion de crise diplomatique jugée unanimement réussie par les néerlandais, puisque 91% d’entre eux, des électeurs socialistes aux électeurs nationalistes considèrent que Mark Rutte a adopté la bonne attitude face au gouvernement turc.

De nombreuses réactions politiques en France

Alors que l’Etat français, contrairement à ses voisins européens, a décidé d’autoriser le meeting en France de Mevlüt Çavuşoğlu, les réactions des candidats à l’élection présidentielle ne se sont pas faites attendre. Depuis les Antilles, le candidat du Parti Socialiste Benoit Hamon défend la ligne du Quai d’Orsay : selon lui, « le rôle de la France n’est pas d’interdire a priori un débat ».

A l’inverse, l’opposition fait front : d’après Florian Philippot, Vice-Président du Front National, « le gouvernement français est faible », et il n’y avait aucune raison « d’accepter cela sur le sol français ». Le candidat Les Républicains François Fillon considère lui dans un communiqué de presse que « François Hollande rompt de manière flagrante la solidarité européenne » alors que Berlin et Amsterdam ont été « publiquement insultés de façon inqualifiable ».

Enfin, le candidat d’En Marche ! Emmanuel Macron a réagi dimanche soir, déplorant l’absence de « réponse européenne commune » à cette crise. Il « aurait souhaité que l’Union Européenne interdisse ces meetings ».

Être patriote : ah bon, pourquoi ?

Rejet de l’autre, rétablissement des frontières… le nationalisme a le vent en poupe et le bagage idéologique qu’il porte dans sa cale se répand dans l’opinion publique. En France, l’avancée du Front National démontre le retentissement de ces thèses ; mais le terme de nationalisme ne sied plus à la volonté de dé-diabolisation du parti d’extrême-droite. Il lui est alors préféré le terme de patriotisme, plus rassurant et permettant d’élargir les électeurs potentiels. Là où le nationalisme évoque la violence et l’agressivité, le patriotisme suggère une forme de fraternité au sein d’un même peuple, selon la célèbre phrase de Romain Gary : “Le patriotisme c’est l’amour des siens, le nationalisme c’est la haine des autres”.

Le sentiment patriotique relève tout d’abord d’un lien affectif, de la relation presque intime que l’individu entretient envers son pays ; le mot revêt une dimension sacrificielle, l’idée de placer la défense des intérêts de la patrie comme une cause importante. Le mot est entretenu par des représentations qui stimulent une forme de fierté à l’égard de la patrie. Dans l’imaginaire collectif, le terme de patriote renvoie au héros qui est prêt à mourir pour un intérêt supérieur. L’étymologie du mot nous renseigne sur sa visée : dérivé de pater, le père, il associe la patrie à une grande famille. Instinctivement, la plupart des gens aiment leur famille et seraient prêts à la défendre :  le principe de défense de la patrie est donc naturellement intégré. Mais qu’implique-t-il ?

Dans son discours Patriotisme & Internationalisme, Jaurès s’affirme patriote sans l’opposer à l’internationalisme ; “patriotisme et internationalisme ne sont que deux formes, se complétant, du même amour de l’humanité”. Il considère les patries comme une étape dans l’accomplissement d’une unité humaine. Mais aurions-nous dépassé cette étape ?

Car le patriotisme, au-delà des dérives et instrumentalisations du terme, porte en loin une forme de préférence pour les personnes avec qui nous avons le plus en commun. Si cela peut s’expliquer à l’échelle des sentiments humains, la revendication patriote apparaît comme une barrière toxique à la recherche de l’intérêt général humain.

La mondialisation a nourri ces critiques et même dans les courants de la gauche, à la recherche d’une souveraineté démocratique que le néolibéralisme lui a ôtée. Mais estimer trouver une réponse dans une simple réponse patriotique ne tient pas compte des effets de la mondialisation : elle a profité aux grands groupes industriels et financiers surpuissants, aux intérêts de mêmes minorités privilégiées. La réponse aux effets pervers de la mondialisation ne peut donc pas se trouver dans un repli mais dans l’organisation internationale de luttes sociales : l’humanité plutôt que la patrie. Face à la globalisation des puissants, opposons l’idéal internationaliste et travaillons, peuples mains dans la main, à l’émancipation de tous.

Présidentielles 2017 : on s’intéresse au programme Economique d’En Marche

“De droite et de gauche”. C’est avec une certaine aisance qu’Emmanuel Macron parvient à conforter le mythe : son programme économique est d’un nouveau genre. Présenté en deux temps (une première partie de celui-ci ayant d’abord été annoncée ici, puis le reste ), le programme de celui qui se définissait comme le “candidat du travail” et “des classes moyennes et populaires” peut se résumer en quatre idées-phares.

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I-Télé, la mal-aimée

Mal aimée par sa direction, boudée par les téléspectateurs, I-Télé a tiré sa révérence le 27 février dernier. C’est au petit matin qu’un jingle d’une vingtaine de secondes mit fin, laconiquement, à 17 années d’information en continu. Retour sur les derniers soupirs de la chaîne où «l’information ne s’arrête jamais».


L’antithèse de BFMTV.

I-Télé n’a jamais pu durablement devancer sa grande rivale BFMTV, aussi bien en audiences qu’en termes de rentabilité. Depuis 2005, date à laquelle elle rejoignit la TNT, I-Télé n’a cessé de prendre des virages éditoriaux, au grès des changements d’organigramme du groupe Canal +.

Cette stratégie, fructueuse en 2006, n’a permis à la chaîne que d’être leader, en l’espace de quelques mois, en part de marché sur la TNT. Excepté en 2010, où la chaîne au logo triangulaire devint leader pendant 1 mois, BFMTV a pris soin de distancer cette dernière, d’abord d’un dixième puis de plusieurs pour cent de part de marché.

Ce n’est qu’à partir de 2012, qu’I-Télé stabilise sa grille, et fixe sa cible, avec la nomination de Cécilia Ragueneau et Céline Pigalle à la tête de la chaîne. Elle entendait alors se différencier de sa principale concurrente en misant sur des décryptages et des débats quand BFMTV faisait part belle au « Hard-News ». Malgré de beaux discours, I-Télé n’a pu s’empêcher de revenir sur ce qui faisait le succès de sa concurrente, en réduisant les débats et en se recentrant sur l’information en continu.

On ne compte plus les changements de slogans et de plateaux. I-Télé se cherche et ne se trouve pas. Elle demeure l’antithèse de BFMTV, perdue dans sa recherche d’identité, comme boudée par les téléspectateurs. 


 
2015, le début de la fin.

En 2015, après avoir pris la tête du conseil de surveillance du groupe Vivendi, maison mère de Canal+, Vincent Bolloré entre, en grande pompe, à coup de licenciements à la tête du groupe Canal +. Il décide d’un brutal régime d’amaigrissement budgétaire de la chaîne mère dans un premier temps : des émissions historiques passent à la trappe en même temps que l’organigramme du groupe.

I-Télé ne subit pas directement les cures du milliardaire breton. En effet, ce dernier se targue de faire annoncer qu’il « ne sait pas quoi faire d’I-Télé » ou encore que dans « sa stratégie, l’information n’a pas de place ». La rédaction patiente dans ces heures de latences, comme un condamné à mort qui monte sur sa potence.

Dans ce contexte, déjà tendu, ce n’est pas un, mais deux nouveaux concurrents qui entrent dans ce marché ô combien concurrentiel. LCI, première chaîne d’information historique du pays se voit accordé un canal de la TNT en avril 2016. FranceInfo, énième chaîne du service public, est annoncée pour le mois de septembre de la même année. Toutes font la sempiternelle promesse d’un traitement différent de l’actualité.

Une reprise en main musclée.

Il n’en fallait pas moins pour que les tentacules du Tycoon breton s’arrêtent sur I-Télé.
Exit Céline Pigalle et Cécilia Ragueneau, place à des proches de Vincent Bolloré.

Guillaume Zeller, numéro un de la chaîne, arrive tout droit de Direct Matin, journal appartenant au groupe Bolloré. Lors des premières rencontres avec la rédaction, il prononce une phrase qui est censée apaiser un climat déjà tendu : « Je suis là pour apprendre de vous ». Difficile pour lui de masquer son manque d’expérience : passer d’une équipe s’occupant de la rédaction d’une revue pleine de réclame, à la tête d’une chaîne nationale n’est pas une mince affaire. I-Télé se retrouve, en outre, dirigée par un soutien assumé d’une frange catholique traditionaliste qui parfois ne refuse pas quelques interventions sur la chaîne controversée « Radio Courtoisie ».

La numéro deux de la rédaction se prénomme Virginie Chomicki, future tête de gondole de CNEWS, elle est se retrouve décriée par ses anciens collègues de LCI qui l’estime incapable de diriger une telle équipe après avoir effectué quelques chroniques à l’antenne. Guillaume Zeller est rapidement remplacé par Serge Nedjar, en mai 2016. Ce dernier est alors président de « Bolloré Média Régie ».
C’est un nouveau fidèle qui prend la tête d’I-Télé. Réputé cassant, il n’hésite pas à asséner devant la rédaction « Je serai l’homme à abattre, celui que vous allez détester ». Son but, multiplier les synergies avec les filiales achetées par Bolloré. Après le rachat de Gameloftpar Vivendi, il n’hésite pas à demander aux journalistes de couvrir une conférence de presse de la firme spécialisée dans le digital. Selon lesJours.fr, il serait allé jusqu’à censurer un reportage sur l’affaire Fillon, au matin sa publication par le Canard enchainé.

Enfin Philippe Labro est une ancienne connaissance de Vincent Bolloré. Il avait notamment participé au lancement de la chaîne Direct 8, alors propriété de Bolloré, actuel chef du groupe Canal + avant d’être revendue…à Canal +. Triste revanche.


Une grève sans précédent.

Une autre star de Direct 8, devrait également faire son apparition : Jean-Marc Morandini. Il avait contribué au succès de la chaîne notamment avec son émission média qu’il avait humblement appelée « Morandini ». C’est cette recrue qui fait exploser la rédaction en proie aux licenciements et à la diète budgétaire. En effet, Jean-Marc Morandini est empêtré dans une affaire de corruption de mineur aggravé. Les méthodes « journalistiques » de Jean-Marc Morandini ne correspondent pas, par ailleurs, à l’identité de la chaîne pour certains de ses confrères. 

C’est pendant 31 jours de grève que la majorité de la rédaction manifestera son désaccord concernant l’arrivée de Jean-Marc Morandini à l’antenne. Une assurance d’indépendance de la rédaction est dans le même temps demandée. I-Télé devient entre-temps une chaîne documentaire où des rediffusions de reportages Canal + tournent en boucle.

 Il n’en est rien. 31 jours de grèves, près de 80 départs, une élection américaine non couverte, des pertes de points de part de marché, des journées de pleurs, de peur de la précarité, n’auront servi à rien. Le soutien de personnalités du monde politique et médiatique n’ont rien bouleversé : ni l’intervention de la ministre du Travail Myriam El Khomri, ni le soutient d’une majorité de leurs confrères ont pu changer la donne.  Le message de Vincent Bolloré est clair : « Vous obéissez, ou vous dégagez ».

 La plus longue des grèves de l’histoire de l’audiovisuel français depuis 1968, qui frappait alors l’ORTF, n’aura pas permis la signature d’une charte éthique, ni la mise en retrait durable de l’antenne de Jean-Marc Morandini.


Nouveau look pour une nouvelle vie ?

À son arrivée, Vincent Bolloré annonce un rebranding total des chaînes du pôle gratuit du groupe. I-Télé n’est pas une étoile de « la galaxie Canal », elle deviendra donc CNEWS.

Annoncée d’abord en septembre 2016, elle sera, suite à la grève, repoussée au 27 février dernier. Une révolution est annoncée pour faire table rase du passé : ce sera « une chaîne d’infos de décryptage où les différentes opinions peuvent s’exprimer » disait alors Gérald Brice-Viret, directeur général du groupe. 
On annonce l’arrivée de vieilles gloires du PAF (Paysage Audiovisuel Français) à l’instar de Jean-Pierre Elkabbach, dernièrement évincé d’Europe 1. Patrick Poivre d’Arvor, Rachid Arhab, Marc Menant : moyenne d’âge 70 ans.

Autre les recrues d’un autre temps, CNEWS, se démarque d’I-Télé par ses nouveaux débats, où il est question de “pénoplastie”, de franc-maçonnerie ou encore d’immigration.
Le spectre de Jean-Marc Morandini est bien présent : C-RACOLLEUR.
Les journalistes de CNEWS continuent d’alimenter une chaîne qui tourne encore au ralenti. Un ralenti qui profite à l’une de ses concurrentes ; chaîne d’information du groupe Bouygues, LCI, a pu égaliser CNEWS en part d’audience.


La direction du groupe s’est donnée 3 ans pour trouver l’équilibre financier, en maintenant un cout de grille de 20 à 30 millions d’euros : le pari est lancé.