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Baccalauréat 2021 : une révolution ?

C’était une des promesses de campagne du candidat Emmanuel Macron. Le baccalauréat, très vieil examen qui n’ayant cessé d’évoluer au fil des années, va encore changer.


Un nouveau cap

Plusieurs séries sont proposées pour les lycéens dans leur orientation. L’entrée en classe de première est marquée par la spécialisation dans une série, proposant des enseignements de tronc commun et de spécialité. Il existe un baccalauréat général (trois séries), un baccalauréat technologique (7 séries) et un baccalauréat professionnel (plus de 90 spécialités).

Les années de lycées sont sanctionnées par des épreuves en classe de première (français voire sciences) et des épreuves en classe de terminale. Les épreuves finales sont aujourd’hui en France beaucoup plus nombreuses que dans les autres pays, ce qui alourdi l’examen actuel. La concentration, d’ailleurs, d’un grand nombre d’épreuve (environ quinze) en un laps de temps très court (une semaine environ) n’est en réalité qu’une période intense d’anxiété pour les lycéens et cela n’apporte pas grand chose.

Dans le but de réformer cette institution nationale, Emmanuel Macron a décidé d’inscrire dans son programme une grande réforme, visant à proposer une nouvelle organisation du temps scolaire pour les élèves et leur proposer également plus de choix. On a pu entendre que le candidat voulait instaurer un baccalauréat “à la carte”. En réalité, la volonté de l’élève est importante car elle permet de l’aider à effectuer des choix pour l’orientation post-baccalauréat et de préparer au mieux l’arrivée dans l’enseignement supérieur. En effet, le taux de réussite pour la première année de licence est très bas et cette revalorisation du baccalauréat devrait permettre de devenir un véritable tremplin pour l’avenir.

Élu président de la République, Emmanuel Macron, sur proposition du Premier Ministre Édouard Philippe, nomma Jean-Michel Blanquer, ancien directeur de l’ESSEC, ministre de l’Éducation Nationale. C’est d’ailleurs dans son discours de politique générale que le Premier ministre a précisé que la première session de ce nouveau baccalauréat interviendrait dès 2021.

Dans le but d’apporter une solution nouvelle et concertée, le ministre confia au Pierre Mathiot, professeur des universités, le soin d’effectuer un rapport sur le baccalauréat de demain. Un rapport d’une soixantaine de pages a été rendu le 24 janvier 2018.

Un changement concerté

La question de la consultation est devenue importante, dans le but de récolter des témoignages, des avis, des idées. Pierre Mathiot a donc, durant ces mois de travail, entendu la voix des représentants et des institutions qui sont concernés par cette nouvelle réforme.

Il a également été à la rencontre des premiers concernés, les lycéens, à travers des réunions d’information, des ateliers et surtout, par le biais d’une consultation en ligne, ouverte à tous. 40 000 lycéens ont répondu à cette enquête et se sont donc exprimés quant à leurs souhaits pour leur futur.

Des discussions sont également survenues à l’international, afin d’obtenir un point de vue externe sur la situation de la France.

Un bouleversement sur l’orientation

La réforme du baccalauréat prévoit également une nouvelle organisation concernant les enseignements, avec la fin des séries en voie générale. Trois enseignements seront offerts par le lycée.

Le premier, tout d’abord, est un socle de culture commune. Dans ce dernier, on retrouve des matières telles que le français, l’histoire-géographie, les langues vivantes et également une nouvelle matière, dont l’intitulé est mystérieux : humanités scientifiques et numériques.

Ensuite vient les disciplines de spécialité que l’élève devra choisir. Le choix est très varié et c’est l’élève et uniquement l’élève qui sera maître de ses choix. En première, il devra en sélectionner trois et son choix devra s’affiner pour n’en prendre que deux parties les épreuves suivies auparavant. Des enseignements facultatifs pourront permettre à l’élève de compléter son parcours et son dossier scolaire, à son bon vouloir.

Enfin, l’orientation reste un pilier pour le lycée. Un temps d’aide sera prévu pour préparer le futur des élèves ainsi que leur entrée dans l’enseignement supérieur.

Une nouvelle méthode

Le nouveau baccalauréat reposera  sur deux axes : d’une part sur un contrôle continu et pour une autre part sur des épreuves terminales.

Si on s’intéresse au contrôle continu, il comptera pour 40% de la note finale. Le but est de sanctionner le travail tout au long de l’année fourni par les élèves. Il reposera sur les épreuves communes de la classe de première et de terminale (renommée classe de maturité). Ce sont les établissements qui seront en charge de l’organisation des épreuves communes. Une critique selon laquelle le contrôle continu n’est pas égalitaire est balayée car une banque nationale de sujets sera mise en place et mise à disposition des établissements. Les copies seront anonymes et ne seront pas corrigées par les professeurs que les élèves ont. À la fin de la notation, une harmonisation des notes sera effectuée, pour d’éventuels ajustements.

Concernant les bulletins scolaires, ils seront pris en compte pour la régularité du travail fournit. Cependant, il n’est pris en compte que pour 10% de la note finale.

Si on s’intéresse maintenant au plus important, les épreuves finales, elles vont représenter 60% de la note finale. L’épreuve de français en fin de première n’est pas modifiée. Pour la classe de terminale, un élève devra se présenter pour quatre épreuves finales.

L’élève aura deux épreuves écrites. Elles porteront sur les disciplines de spécialités que l’élève aura choisies en classe de terminale. Les épreuves seront passées au retour des vacances de printemps.

À la fin du mois de juin, comme à l’heure actuelle, il y aura deux autres épreuves. La première est la fameuse épreuve de philosophie, par tradition française et pour laisser le temps aux professeurs de terminer les programmes et d’inculquer un esprit critique aux élèves. Puis, un oral d’environ vingt minutes, préparé en classe de première et terminale sera présenté devant un jury composé de trois personnes. L’élève devra présenter un projet qui sera en lien avec une ou deux disciplines de spécialité que l’élève aura choisi.

L’accueil de la réforme

Cette nouvelle forme du baccalauréat a fait beaucoup de bruit car, en effet, on touche concrètement à une institution nationale très vieille et traditionnelle. Pour illustrer cette partie, petite sélection de tweets avec #Bac2021.

Cette réforme fait des heureux et des malheureux. Comme à chaque fois, il y a des personnes qui sont en faveur et d’autres contre la réforme. La démocratie permet l’expression d’avis différents et le gouvernement est prêt à entendre les avis des personnes et institutions concernées dans la mise en place de ce nouveau baccalauréat.

Entre les professeurs, quelques questions se posent et il conviendra, dans le futur, d’apporter des solutions à ces problématiques.

Mais le baccalauréat n’est pas mort, il change.

DTA! – Interview de Pierre-Yves Bournazel

Un nouveau député a accepté l’invitation de notre média pour répondre à nos questions. Il s’agit de Pierre-Yves BOURNAZEL. Il est le vice-président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, est également le porte parole du groupe “Les Constructifs” à l’Assemblée Nationale.

 

“Les Constructifs défendent des valeurs européennes, libérales-sociales et en faveur des réformes structurelles”

 

Comment s’est déroulée votre arrivée au sein de l’Assemblée ?

Entrer dans un lieu autant chargé d’Histoire vous oblige. Je me suis pleinement ressenti représentant de la Nation, avec le sérieux que cela implique. De même, j’étais déterminé à travailler dès mon arrivée, et cela n’a pas traîné : entre l’élection de la présidence de l’Assemblée et l’ensemble des débats et votes des projets de Loi sur la moralisation et sur les ordonnances sur le dialogue social. Je me suis investi dans la Commission des affaires culturelles et de l’éducation en prenant un rapport sur la lutte contre les discriminations.

 

Considérez-vous le groupe « Les Constructifs » comme une véritable force de propositions ?

Nous avons beaucoup travaillé sur les projets de loi qui ont été proposés à l’Assemblée (ordonnances pour le dialogue social, loi de confiance dans l’action publique entre autres). Ces projets de lois émanent du Gouvernement, nous avons donc beaucoup travaillé sur le contenu de ces lois. Pour moi, le Gouvernement va dans le bon sens, c’est pourquoi j’ai voté les textes dans l’intérêt général. Nous allons bien sûr être une force de propositions, car notre Groupe est disposé à ce que le pays aille de l’avant, et pour cela, nous ne nous contenterons pas uniquement de voter des textes.

 

Pouvez-vous expliquer en quelques phrases le fonctionnement d’adoption d’une loi ?

La procédure législative comprend trois phases : le dépôt du texte, son examen par les parlementaires, et sa promulgation par le Président de la République. L’esprit qui prévaut est la recherche d’un consensus entre les deux assemblées, c’est le principe de la fameuse « navette parlementaire ». Pour un projet de Loi, le Gouvernement défend le texte devant les parlementaires. Pour une proposition de Loi, il est présenté par un ou plusieurs parlementaires. Ces derniers ont un droit d’amendement, c’est-à-dire modifier le texte sur des points qui leur paraissent ambigus ou supprimer des éléments qui peuvent nuire à la compréhension ou à l’exécution de la loi. Chaque amendement doit être défendu, débattu, puis voté (ce qui peut expliquer la longue durée des débats).

Une fois l’ensemble du texte voté dans la Commission compétente, il arrive enfin dans l’hémicycle pour le débat en séance publique, avec droit d’amendement, devant l’ensemble des parlementaires. Si la majorité votent pour, le texte est alors adopté et arrive dans la seconde Chambre. Si le texte est adopté par les deux chambres, il est alors transmis au Gouvernement qui le présente à la signature du Président de la République pour promulgation.

 

Un député LC, c’est un député qui est forcément dans la majorité ?

Avec l’élection d’Emmanuel Macron, les partis politiques traditionnels doivent se réinventer et cesser d’être une face du jeu manichéen opposition / majorité. Alors non, un député LC n’est pas forcément dans la majorité, tout comme il n’est pas forcément dans l’opposition. Le groupe LC a été constitué pour rassembler tous les parlementaires qui refusent cette conception binaire du parlementarisme qui n’a plus lieu d’être aujourd’hui. Les lois que nous soutiendrons, et que nous voterons, doivent tout simplement servir l’intérêt général (ce qui, doit-on le rappeler, doit être la première motivation de tout parlementaire). Donc nous apportons effectivement notre soutien au Gouvernement lorsque le projet de loi respecte nos valeurs et semble emmener la France vers la bonne direction. Nous considérons qu’il ne faut pas pratiquer une opposition frontale (ce qui ne nous empêche pas de contrôler efficacement l’action du Gouvernement lorsqu’il prend des positions qui nous semblent contraire à la ligne d’orientation). Nous avons ainsi une démarche véritablement constructive avec le Gouvernement, car il faut en finir avec les faux clivages politiciens lorsque l’avenir du pays et des français est en jeu.

 

Arrivez-vous à cohabiter ensemble, entre UDI et LR ?

Nous avons décidé de fédérer notre groupe autour d’une co-présidence. L’équilibre est ainsi garanti et nous préserve de rivalités qui en réalité n’ont pas lieu d’être puisque nous sommes libres et unis. Parfois les avis divergent, ce qui est normal et sain pour le débat. Chaque député garde sa liberté de penser et d’action, mais nous allons dans la même direction. Plus qu’une cohabitation, nous partageons la même volonté et la même démarche : aller de l’avant, et faire en sorte que l’intérêt général soit toujours défendu pour que la France puisse se réformer en profondeur.

 

Les Constructifs ont-ils vocation à devenir plus grand ? Pourquoi pas devenir un nouveau parti politique ?

Notre Groupe parlementaire nous permet de faire émerger des idées nouvelles, et une force politique nouvelle pourrait advenir si des élus locaux et des citoyens y sont prêts.

 

Sur la loi de confiance sur la vie publique, votre groupe est assez peu intervenu : avez-vous une explication à cela ?

Les députés de mon groupe sont régulièrement intervenus dans les débats. Par exemple, j’ai voulu apporter ma contribution dans l’élaboration du texte, en proposant une extension des peines d’inéligibilité à toute personne définitivement condamnée pour antisémitisme, racisme et homophobie ou toute forme de discrimination. Les dispositions que j’ai proposées ont été reprises par le Gouvernement et je m’en félicite. Il y a également tout le travail des députés qui a été fourni en Commission.

 

Quelles sont vos véritables différences avec le groupe LR ?

Un certain nombre de points nous éloignent. Tout d’abord, je regrette la « droitisation » du discours de certains Républicains. Cette droite identitaire se place dans une opposition frontale, en prenant parfois le risque de critiquer des propositions que la Droite aurait pu faire si elle avait été en responsabilité. On ne peut plus raisonner en fonction de l’alternance traditionnelle des Groupes majoritaires. Les Constructifs défendent des valeurs européennes, libérales-sociales et en faveur des réformes structurelles. Pour cela il faut permettre au Gouvernement de pouvoir réformer en profondeur notre pays.

Quelle est l’ambiance au sein de votre groupe ?

Très cordiale et chaleureuse, et bien évidemment studieuse.

 


Propos recueillis par Arthur Lambert pour Les Décryptages. Nous remercions encore M. Bournazel pour avoir répondu à nos questions.

DTA! – Interview de Olivier Dassault, député LR

Troisième article de notre format : “Dans Ton Assemblée !”. Cette semaine nous retrouvons, dans une interview exclusive, le député de la 1ère circonscription de l’Oise : Olivier DASSAULT, qui appartient au groupe « Les Républicains » !

« Nous souhaitons être une opposition intelligente, qui accompagne les décisions qui vont dans le bon sens ».

 

Le groupe Les Républicains est-il un des groupes qui fournit une véritable opposition ?

Avec 100 députés et 171 sénateurs depuis dimanche Les Républicains et leurs alliés sont le premier groupe d’opposition au Parlement.

Ils portent la voix des millions de Français qui se sont reconnus dans la candidature de François Fillon, ceux qui ont toujours soutenu Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac et si l’on remonte plus loin le Général de Gaulle.

Pour autant nous souhaitons être une opposition intelligente, qui accompagne les décisions qui vont dans le bon sens comme certaines dispositions de la réforme du code du travail et qui s’oppose à la hausse des prix du diesel et de la CSG qui va appauvrir les habitants des territoires ruraux et les retraités mais aussi la baisse des Aides pour le Logement qui va toucher les personnes plus fragiles.

Est-ce qu’il y a une véritable rupture entre votre groupe et le groupe LC ?

De notre côté la porte est ouverte aux membres des Républicains qui y siègent mais je pense qu’il faut d’abord que ce nouveau groupe trouve sa voie politique et son utilité alors que la majorité présidentielle n’a aucun besoin de son apport numérique pour faire passer ses textes.

Quels sont les grands rendez-vous parlementaires pour cette fin d’année et quels sont vos horizons d’attentes pour 2018 ?

Le budget est toujours le grand rendez-vous parlementaire de la fin d’année. En plus il est prévu que désormais nous ayons un budget pour les 5 ans du quinquennat, je suis curieux de le découvrir.

Les réformes de l’Impôt sur la Fortune et de la taxe d’habitation entreront en vigueur au 1er janvier 2018. Le crédit d’impôt compétitivité-emploi devrait être transformé également cette année. Les annonces sont là. Il reste maintenant à voir ce qu’il en adviendra réellement.

Quelle est la chose que vous appréciez le plus dans votre fonction de député ?

Le fait d’être au contact chaque week-end des habitants de la première circonscription de l’Oise que j’ai l’honneur de représenter depuis 1988.

Quel est votre avis sur les ordonnances ?

Le dispositif des ordonnances existe dans la constitution pour une raison bien spécifique : permettre au Gouvernement d’aller vite. Je suis un légaliste et un gaulliste donc je respecte leur utilisation prévue par la Constitution. Evidemment elles ne doivent pas devenir la norme.

On pense souvent que les groupes d’oppositions ont du mépris pour la majorité : vrai ou faux ?

Généralement c’est plutôt l’inverse, l’arrogance venant en gagnant les élections. Mais celle-ci se dissipe rapidement car avec le travail parlementaire nous apprenons à nous connaître et nous découvrons des points d’entente. Le mépris n’a pas sa place à l’Assemblée nationale.  

Comment se déroule le travail de parlementaire en dehors des séances publiques ?

Le travail parlementaire se fait majoritairement en commission où nous discutions les projets et propositions de lois. En fonction de nos rôles sur tel ou tel texte, rapporteur, rapporteur pour avis, orateur de groupe, nous travaillons ensuite individuellement avec les administrateurs de l’Assemblée pour en maîtriser toutes les subtilités.

Êtes-vous prêt à voter POUR une loi qui semble aller dans le bon sens ?

Bien entendu. Un député est avant tout un représentant de la Nation et ses choix doivent être avant tout guidés par l’intérêt général. Par exemple je pense que la réforme du code du travail portée par le gouvernement si elle ne va pas assez loin va dans le bon sens et donc je l’ai soutenu en votant pour.

Un député vote en fonction de ce que le groupe décide ou de ce que ses électeurs trouvent le mieux ?

Un député vote en fonction de l’intérêt général après il est vrai qu’une certaine cohérence est nécessaire et que la discipline de vote existe néanmoins les députés sont des hommes et des femmes libres qui votent en leur âme et conscience.

– Questions choisies et propos recueillis par Arthur Lambert pour Les Décryptages.


Nous remercions encore M. Dassault pour avoir répondu à nos questions et vous disons à bientôt pour de nouveaux articles !

DTA! – Interview de Christophe Bouillon, député Nouvelle Gauche

Bienvenue dans ce second article de “Dans Ton Assemblée !”, votre nouveau format qui décrypte l’Assemblée Nationale ! Cette semaine, nous retrouvons le député de la 5ème circonscription de Seine-Maritime Christophe BOUILLON. Il appartient au groupe « Nouvelle Gauche » et siège à la commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire. Il est également membre de l’Office Parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques : c’est une de ses missions de parlementaire.

Comment s’est déroulée votre arrivée au sein de l’Assemblée ?

Plutôt bien ! J’y suis entré pour le troisième et sans doute dernier mandat. Je maîtrise mieux les codes de l’Assemblée, contrairement à 2007 où c’était davantage la découverte.

Après quelques mois au sein de l’Assemblée nationale, vous avez été un des groupes les plus dynamiques. Considérez-vous le groupe « Nouvelle Gauche » comme une véritable force de propositions ?

Le groupe « Nouvelle Gauche » est à la fois force d’opposition et force de propositions. Personnellement, j’ai fait campagne sur le thème « ni opposition systématique, ni majorité automatique ». Je respecte cette ligne qui est d’abord un engagement vis-à-vis des habitants de ma circonscription.

Êtes-vous l’équivalent de gauche du groupe « les Constructifs » ?

Pas tout à fait. Nous n’avons pas voté la confiance au Gouvernement, contrairement au groupe « les Constructifs ». Par ailleurs, ce groupe est issu d’une division des Républicains ; le groupe « Nouvelle Gauche » rassemble, au contraire, les députés socialistes. L’un souhaite l’éclatement de la droite, l’autre entend participer à la reconstruction ou refondation du Parti Socialiste et au renouvellement de la gauche.

Concernant les questions au Gouvernement, avez-vous un angle d’attaque plus particulier qu’un autre ?

Ma « marotte », c’est le développement durable et les questions énergétiques. J’ai beaucoup travaillé sur la loi de Transition Energétique pour la Croissance Verte et toutes les lois importantes du précédent quinquennat. Mon objectif, c’est qu’on ne dévie pas de la trajectoire et qu’au contraire, on accélère la démarche. A côté de ces questions qui sont essentielles, j’interpelle régulièrement le Gouvernement sur des sujets qui ne sont pas nécessairement au cœur de l’actualité mais qui concernent pourtant le quotidien d’un grand nombre, par exemple, ces derniers mois, j’ai saisi des ministres sur les questions liées à l’apprentissage, à la protection des tuteurs familiaux, à la tarification des EHPAD, au handicap…

Quel est votre avis sur les ordonnances publiées récemment ?

Je me félicite de plusieurs avancées en particulier pour les TPE et PME. Mais je dénonce le fait que la protection des salariés est le parent pauvre de cette réforme. Je ne crois pas qu’une plus grande flexibilité s’accompagne des embauches escomptées. Je déplore entre autre la fin du « compte pénibilité » qui permettait aux salariés qui travaillent dans des conditions difficiles d’anticiper leur départ à la retraite. Désormais, la manutention de charges lourdes, l’exposition aux postures pénibles, l’exposition aux vibrations mécaniques et aux risques chimiques ne seront plus prises en compte pour mesurer la pénibilité. C’est un très mauvais coup porté aux salariés. Le Premier Ministre a indiqué que le texte ferait l’objet d’un débat à l’Assemblée nationale. Avec mes collègues, nous poserons un certain nombre de principes sur lesquels il est essentiel de revenir pour rendre cette réforme acceptable. En l’état, elle ne l’est pas.

Nous sommes en période de rentrée scolaire, quelle est pour vous la principale chose à réformer dans l’école en général ?

Il serait bon d’éviter de détricoter systématiquement le travail des prédécesseurs ! Chaque ministre veut accrocher son nom à une réforme et cela aboutit à des décisions prises dans la précipitation, sans prendre suffisamment soin d’évaluer et d’analyser ce qu’il conviendrait de maintenir ou de faire évoluer. Il faudrait, au contraire, se donner du temps. Replacer l’enfant-élève au cœur du dispositif me paraît aussi essentiel. Je veux également insister sur le fait que l’éducation ne doit pas seulement former à un futur métier ; elle doit aussi forger des citoyens par l’apprentissage des fondamentaux et la formation d’esprit critique. Qu’on arrête de regarder les études PISA comme l’unique thermomètre de l’action !

« L’éducation doit forger des citoyens par l’apprentissage des fondamentaux et la formation d’esprit critique »

Est-ce important pour vous de rendre accessible la politique à toutes et tous ?

Oui, c’est fondamental. Dans mon parcours, depuis toujours, j’y veille en favorisant, concrètement, le renouvellement et le rajeunissement de la vie publique. Je suis sensible à cette question car j’ai le souvenir précis du jour où j’ai dit à ma mère que j’avais envie de faire de la politique. Elle m’a répondu : « la politique, ce n’est pas pour nous » (je suis fils d’une femme de ménage et d’un marin). Je n’ai cessé, depuis lors, de lui démontrer le contraire.

Comment qualifiez-vous vos relations avec les différents groupes ?

Elles sont plutôt bonnes. En commission, je trouve qu’il y a un esprit de travail. Il est vrai que l’on ne choisit pas de siéger à la Commission Développement Durable et Aménagement du Territoire par hasard. Il faut avoir un intérêt pour le sujet. J’y retrouve donc des hommes et des femmes passionnés par ces questions. En séance, la posture l’emporte parfois sur le reste…

Pouvez-vous nous expliquer les enjeux du Projet de Loi de Finances ? Quelles sont vos attentes là-dessus ?

C’est le premier Projet de Loi de Finances du gouvernement. C’est une épreuve de vérité. Jusqu’alors, le gouvernement a donné le sentiment d’être inspiration très libérale. Le centre de gravité est clairement à droite. A travers les priorités et les choix budgétaires, je crois pouvoir vérifier ou pas ce constat. Les masques vont sans doute tomber. Le « ni droite, ni gauche » va peut-être devenir « ni gauche, ni gauche » qu’illustrent des options que je juge négatives pour le pays et les Français. Je regrette notamment les décisions qui concernent les contrats aidés ou la baisse des APL. Je serai vigilant sur les questions liées à l’environnement. J’apprécie les déclarations de Nicolas Hulot avec l’annonce du Plan Climat. Mais il ne faudrait pas qu’elles soient contrariées par un manque de moyens budgétaires ou des décisions contradictoires. A quand une vraie fiscalité écologique ? Par ailleurs, je m’opposerai résolument à l’augmentation de la CSG !

Un député « Nouvelle Gauche », c’est un député qui…

… qui rejette la vieille politique et qui reste de gauche !

Quelle est votre journée-type ?

Je préfère vous décrire une semaine-type car aucune journée ne ressemble vraiment à une autre ! En général, le lundi, je travaille sur les dossiers, je réunis mon équipe et je participe à des réunions et des rendez-vous avec les administrations. Du mardi matin au jeudi midi, je suis à l’Assemblée nationale. Le jeudi après-midi et la journée du vendredi, je vais à la rencontre des habitants de la circonscription, en les recevant en rendez-vous et en effectuant des visites de terrain (visites d’entreprises, d’exploitations agricoles, d’associations…). Le samedi et le dimanche, je sillonne la circonscription pour participer à diverses manifestations organisées dans les communes. C’est un schéma-type qu’un impératif vient toujours perturber ! Quoiqu’il en soit, mon agenda ne compte aucune journée « vide ».

Un député, ce doit être une personne de terrain ou de fond ?

J’ai envie de vous répondre « les deux, mon capitaine ! » Pour ma part, j’ai bâti ma démarche sur le « terrain et l’humain ». Les deux sont indissociables et se complètent : il faut à la fois être à l’Assemblée pour voter la Loi, l’amender, l’améliorer, et à la fois être sur le terrain pour accompagner, soutenir, s’inspirer et défendre. Un député, c’est « la tête et les jambes » ! La fonction demande de réfléchir aux enjeux du pays et de la société et d’agir pour y répondre. Je considère qu’il faut être aussi proche des problèmes que des solutions. Cela est exigeant mais c’est le juste retour de la confiance que les citoyens nous ont accordée, me semble-t-il.

– Propos recueillis par Arthur Lambert.


Nous remercions encore M. Bouillon pour avoir répondu à nos questions et vous disons à bientôt pour de nouveaux articles !

DTA! – Interview de Nathalie Avy-Elimas, députée MoDem.

C’est la première fois que vous tombez sur ce genre d’article sur « Les Décryptages ». En cette rentrée 2017, nous avons décidé de mettre en place une rubrique spéciale concernant l’actualité de l’Assemblée Nationale : “Dans Ton Assemblée!”. Au cœur des commissions parlementaires, des séances publiques et avec les députés, nous plongeons au sein de l’institution.

Aujourd’hui, nous commençons fort; avec une interview de la députée MoDem (Mouvement Démocrate, présidé par Francois Bayrou) du Val d’Oise : Nathalie AVY-ELIMAS, qui a accepté de répondre à nos questions.


Comment s’est déroulée votre arrivée au sein de l’Assemblée ?

Les personnels des services administratifs de l’Assemblée nationale ont fait l’impossible pour nous mettre dans de bonnes conditions. Je souhaite les en remercier car cela m’a permis de prendre mes marques plus sereinement et de me mettre vite en action. Pour le reste, comme mes collègues, j’ai dû, en quelques semaines, organiser ma vie personnelle, constituer une équipe, trouver un local en circonscription, répondre aux sollicitations… Le tout alors que les premiers travaux parlementaires – et non des moindres – commençaient.

Les groupes LREM / MoDem sont-ils les meilleurs amis du monde ?

La relation entre les groupes LREM et MoDem s’appuie sur la volonté des députés qui en sont membres de transformer la France pour qu’elle entre enfin dans le 21e siècle et qu’elle s’adapte au monde qui l’entoure.

Nous avons nos sensibilités – et cela est même vrai au sein d’un groupe – mais nous sommes d’accord sur l’essentiel, à savoir la nécessité de réformer notre pays en modernisant notre économie, en remettant l’éducation au centre de notre cohésion nationale et en redonnant confiance à nos concitoyens dans leurs institutions et leurs représentants.

Il ne faut pas lire les choses de manière binaire : amis ou ennemis. Nous sommes partenaires. Nous ne serons pas d’accord sur tout mais nous souhaitons tous avancer dans le même sens.

Pourriez-vous voter contre une loi si elle ne vous semble pas intéressante ou n’allant pas dans le bon sens ?

J’ai la chance d’appartenir à un groupe – le MoDem – dont les membres partagent en commun un grand nombre de valeurs. Il y a donc des chances pour que je me retrouve dans les positions du groupe.

Si cela n’était pas le cas – et notamment si je considère qu’une ligne rouge pourrait être franchie – je n’exclurais pas de voter contre en séance. Mais cela se ferait en bonne intelligence et après discussion avec les dirigeants du groupe.

Avec deux très grands groupes majoritaires, comment cela s’organise en interne ?

Les échanges sont constants entre les dirigeants de nos deux groupes. Pour le moment, j’ai plutôt l’impression que cela fonctionne. De mon point de vue, Marc Fesneau, jusque-là secrétaire général du MoDem représente très bien notre groupe dont il porte la voix au sein de la majorité. Je regarde donc cela de loin et souhaite me concentrer sur mon propre travail à l’Assemblée, au sein de la Commission des affaires sociales.

Quels sont vos horizons d’attente pour cette rentrée parlementaire ?

A court terme, le PLF et le PLFSS constitueront les deux temps forts de l’actualité parlementaire. Les politiques publiques conduites depuis 10 ans ont abouti à une désertification dans les territoires ruraux : moins de services publics aux personnes (santé, éducation, leviers sociaux) et une déliquescence de la présence de l’Etat près de ceux qui en ont le plus besoin. Je m’inscris totalement dans l’ambition du président de la République dans sa volonté de revenir vraiment au principe d’égalité. L’Etat doit faire plus pour ceux qui cumulent les difficultés et j’espère que ces premiers PLF et PLFSS du quinquennat apporteront une réponse en ce sens.

Aujourd’hui, les citoyens des « quartiers » et ceux des milieux ruraux ont le sentiment d’être délaissés. Pour rester fidèle à ses principes, la République ne doit pas lâcher ces territoires. Il est intéressant de noter d’ailleurs que la carte des territoires souffrant d’un manque de services publics et celle de ceux ayant majoritairement voté pour un candidat populiste au 1er tour de la présidentielle se superposent.

Quelle est la chose qui vous a le plus surpris au moment de prendre vos fonctions ?

Incontestablement la masse de sollicitations. Je reçois chaque jour de nombreuses demandes. Mes attachés parlementaires m’aident heureusement à y répondre. Sans eux, il me serait difficile de me concentrer sur le fond des sujets que je traite.

« Je souhaite porter la voix de la sensibilité démocrate et humaniste »

Un député, c’est quelqu’un de terrain ou de fond ?

A l’heure d’Internet et des réseaux sociaux, mais également de la forte demande en démocratie participative, il me semble difficile pour un député d’occulter complètement le terrain. D’un autre côté, beaucoup de députés ont une compétence « métier » ou technique sur certains sujets. Je peux alors comprendre qu’ils soient tentés de se spécialiser sur des thématiques qu’ils maitrisent. René Dosière, dont le travail a été considérable pour faire avancer les choses sur la transparence de la vie publique, illustre parfaitement ce type de député.

Chaque député doit trouver son style. Pour ma part, je souhaite porter la voix de la sensibilité démocrate et humaniste à la Commission des affaires sociales, notamment sur les sujets liés à la santé. Mais je compte bien garder mes réflexes d’ancienne adjointe au maire : rencontrer les habitants et rester à l’écoute de ce qu’il se passe dans mon territoire, là où je vis, où mes enfants vont à l’école et où j’ai longtemps travaillé. Je suis notamment en train de mettre en place un comité participatif, ouvert sans considérations partisanes aux habitants et aux usagers de la circonscription qui souhaiteront collectivement faire avancer un sujet ou co-construire des solutions législatives.

– Propos recueillis par Arthur Lambert.


Nous remercions encore Mme Avy-Elimas pour avoir répondu à nos questions et vous disons à bientôt pour de nouveaux articles !